Ensival et ses rues



                        E N S I V A L 
 
               

                                  GENERALITES


 La fusion de communes influence les voies de communications, l’hydrographie, le classement des monuments et des sites et les armoiries de la nouvelle entité.

 POPULATION  

Le recensement de Mars 1981 accuse à Verviers une population de 65.371 habitants, ce qui, pour les élections d’octobre 1982 lui vaut un conseil communal composé de 8 échevins et de 37 conseillers.

                LES VOIES DE COMMUNICATION 


            Les communications plus ou moins aisées avec les localités voisines tout d’abord, les plus éloignées, sont d’une importance déterminante sur les conditions de vie et le développement d’une bourgade.

         Elles sont elles-mêmes fonction du cadre géographique local, cadre que nous avons déjà pu appréhender par l’une ou l’autre citation ou allusion. Une approche plus poussée, par le biais de documents d’archives plus que par la cartographie ancienne, va nous permettre de mieux préciser cette géographie locale avant même d’envisager de jeter un regard sur les voies et moyens de communication qui ont, au cours des derniers siècles particulièrement, contribué à atténuer les distances et mettre fin à un certain isolement.

                     VOIES DE COMMUNICATION:

                                         a) tram et autobus

          
Qu’il s’agisse du tram (à traction chevaline ou électrique) ou de l’autobus, Ensival est traversé dans le sens Est-Ouest par la ligne n° 1, qui aujourd’hui encore relie Renoupré à Pepinster. Primitivement, l’itinéraire de la ligne n° 1 empruntait la place St-Remacle, la rue des Raines et la rue du Collège, de façon à demeurer « en plaine » ; l’électricité allait lui permettre par la suite de gravir le Thier-Mère-Dieu pour redescendre Crapaurue vers la Place Verte et le Brou. 

      A part cela, cet itinéraire n’a guère varié : venant ainsi de Verviers (Gérard-Champs), il entre rue de Verviers, parcourt la rue des Weînes et atteint la Grand-Place ; il infléchit vers le Sud par la rue Maréchal pour arriver rue de Pepinster et gagner, à hauteur du Pont du Purgatoire, l’ancienne commune de Wegnez (aujourd’hui Pepinster). La traction chevaline ne permettait pas de gravir une pente supérieure à 8 %, Ensival, dans sa vallée, était privilégié par rapport à I Heusy,Stembert et même Dison.

          C’est le 1 "juillet 1884 que fut inauguré notre traction chevaline (une centaine de chevaux et quelque 30 véhicules) ; par contre, lors de l’électrification du réseau, Heusy eut la priorité, précisément à cause de sa côte, et inaugura sa ligne le 1er avril 1900.

             De même que le tram à traction électrique s’est substitué à la traction chevaline, de nos jours le tram électrique est remplacé par l’autobus (exemple les lignes de Spa et d’Eupen) ; toutefois, cette substitution n’est guère aussi radicale, et dans maintes de nos villes, les deux systèmes coexistent : électricité et essence ; l’avenir nous dira lequel des deux l’emportera, face aux problèmes pétroliers contemporains. 

          L’année 1981 où sont écrites ces lignes marquant le centenaire du tram électrique, un court historique de ce moyen de locomotion vient à son heure. 

        Dès 1866, l’ingénieur Werner Siemens s’attacha à réaliser des recherches qui devaient permettre de construire le premier tram électrique ; le 16 mai 1881, la société Siemens et Halske, afin de démontrer la supériorité et la rentabilité de la traction électrique dans le trafic urbain lança, à ses propres frais, sans débours pour la municipalité berlinoise, un unique véhicule répondant à ces caractéristiques : 4 mètres de long, 26 passagers, réseau de 2.500 mètres, 12 parcours aller-retour entre 6 et 23 heures, vitesse limitée à 20 km par la police alors que le double était techniquement possible.

        Le passage était annoncé par une cloche et le passant qui ne s’écartait pas risquait une amende.

           Le courant étant propulsé par le rail, les cochers de fiacres ressentaient une secousse au passage ; des études postérieures engendrèrent l’installation en 1889 du premier « archet », le trolley du réseau aérien que nous avons connu. L’avenir seul nous dira quelle sera la destinée du transport urbain : essence, électricité ? Encore que l’électronique peut nous apporter des réalisations aujourd’hui imprévisibles. 

         Enfin, il existe à Scheepdaal (Chaussée de Ninove) un musée des tramways du pays qui permet au visiteur de revoir notamment plusieurs de nos anciennes voitures. 

                                 b) Chemin de fer

            Les stations de Verviers-Central, de Verviers-Est et de Verviers- Ouest ont fait l’objet d’un historique  voir ici L’adjonction de la commune d’Ensival place la gare d’Ensival sur le territoire de Verviers (1977) ; elle sera décrite sous le titre de l’artère où elle est située « rue de la Station » à Ensival. 

          La voie Verviers Battice a été démolie et a fait place, sur presque tout son tronçon à l’autoroute A27. Un seul élément de cette ligne survit : « la rue de la Halte », à Lambermont, qui sera l’occasion sous ce titre, de décrire la halte aujourd’hui disparue.

                                  

                            Topographie





ENSIVAL. Vue vers le Nord : Lambermont se trouvant au sommet de la côte.
Dessin de Jean JULÉMONT.

          Pour n’offrir au touriste rien de célèbre ou de réputé, la commune d’Ensival n’en est pas moins pourvue d’un ensemble d’agréments et d’avantages sérieux qui lui sont bien particuliers et qui font que, sous tous rapports, elle n’a à jalouser aucune de ses consœurs régionales. Son sort, d’ailleurs, a toujours été rattaché, par les liens les plus étroits, à la fortune du grand centre manufacturier devenu le Verviers actuel. 

              On ne pourrait mieux symboliser Ensival que par l’image d’une brave et avenante Wallonne, quelque peu frondeuse et mutine, grandie au contact de la ville, mais restée sage et raisonnable au point de n’avoir emprunté, aux modes bourgeoises et tyranniques régentant les riches citadines, que tout juste de quoi rehausser, d’un brin de coquetterie légitime, sa grâce et sa simplicité natives. C’est dire que notre localité fait bonne et honorable figure dans le parterre des groupements humains peuplant le bassin de la Meuse. 

            Son territoire, dont le tracé cartographique rappelle vaguement la forme d’un haut pentagone bosselé, s’étale entre i° 27’ 31” et i° 29’ 38” de longitude orientale (méridien de Bruxelles) et entre 50° 33’ 35” et 50° 35’ 19” de latitude boréale. Il se déploie, à vol d’oiseau, sur une longueur de 3.225 mètres' environ du Nord au Sud, et sur une largeur de 2.200 mètres d’Est en Ouest ; mais ces mesures, évidemment, doivent être assez bien majorées si l’on tient compte des nombreuses et puissantes ondulations du sol. 

          Celui-ci, en effet, présente toutes les variantes possibles d’une gamme partant de l’altitude de 335 mètres 28 centimètres, notée un peu au Sud de la ferme de Maison-Bois, et aboutissant à la cote de 137 mètres 66 centimètres fournie par l'étiage des eaux, à l'extrême aval de la commune. L'écart entre ces deux niveaux étant de 197 mètres 62 centimètres donne donc au faciès général d' Ensival une inclinaison moyenne de près de 6 mètres 13 centimètres pour cent. 

          Borné au Nord par les communes de Wegnez et de Lambermont, desquelles la Vesdre le sépare ; à l'Est par Verviers et Heusy ; au Sud par Theux et Pepinster ; à l'Ouest par Pepinster et Wegnez, le sol d' Ensival a une étendue cadastrale de 457 hectares 95 ares 96 centiares , qui se répartissent en quatre sections, savoir : la Section A, dite d' Ensival ; — la Section B, dite de la Haute Folie ; — la Section C, dite du Chant d'Oiseaux ; — et la Section D, dite de La Raye.

           Au 31 décembre 1939, ces sections étaient morcelées en 1993 parcelles, dont 1282 bâties et 711 non bâties, appartenant à 1002 propriétaires et produisant un revenu cadastral de 6.460.306 francs, soit : i°) pour le sol, 209.926 francs, et 2° pour les bâtiments, 6.250.380 francs. 

         Au point de vue orographique, le territoire ensivalois apparaît comme l'un des nombreux contreforts du puissant massif que lisèrent la Vesdre supérieure et la Hoëgne. 

         Dans l'ensemble, il prolonge la pente septentrionale de ce massif, tout en témoignant de son indiscipline foncière par les brusques ruptures d'alignement qui, tantôt le projettent en des sortes de bastions inexpugnables, tantôt se manifestent par de fantaisistes reculs. Ce désordre se complique encore du fait de la profonde entaille, en forme d'Y, où coule le ruisseau principal, le Préry, et de plusieurs ravines secondaires articulées sur celle-ci.

          Une agréable succession de reliefs et de vallonnements — entre lesquels des aplatissements du terrain sont en concordance évidente avec leurs pareils accrochés aux lèvres opposées des thalwegs — donne ainsi au terroir local un modelé empreint à la fois de rudesse et d’aménité souriante. 

     D'autre part, l'enchaînement logique de maints traits naturels fournit l'explication aisée des caractères essentiels du site local.

         C'est, par exemple, l’éperon schisteux de la Heid des Fawes qui a imposé à la Vesdre son large méandre du Bois Godin et, par suite, l'alluvionnement favorable à l'installation de l’ancien quartier des Foukries. De même, c'est l'amoncellement et l’épandage des déjections du Préry qui ont créé le vaste bas-fond compris entre la rue de l’Eglise et le pont du Purgatoire : bas-fond limoneux et fertile, sans lequel n'aurait pu se fixer le noyau de l'agglomération. 

        Vu des hauteurs de Wegnez ou de Lambermont, le sol d’ Ensival se présente comme constitué par trois zones bien distinctes. . 



 ENSIVAL. Large et profonde dépression creusée par la branche orientale du Préry. Dessin de Maurice MARÉCHAL. 

      D’abord , c’est le large épanouissement de la plaine alluviale primitive, aux graviers souvent remaniés. Il longe la partie médiane de la rive gauche de la rivière ; c’est lui qui sert d’assise à la masse serrée des habitations, bâtiments publics et usines, et qui forme, peut-on dire, le cœur de la localité. 

        Puis, c'est une succession de gracieux coteaux, couverts de jardins légumiers, de vergers, de prairies et de bosquets. Sur les coins les plus favorables de cette zone accidentée, se sont établis les hameaux et fermes isolées, dits du Bois, de La Raye, des K'mognes, de la Houckaie, de la Haute Folie, de Donheiid, du Chant d'Oiseaux, du Fond de Logis, de Gérardheid, lesquels constituèrent longtemps les seuls écarts rustiques. Avec l’extension croissante des moyens mécaniques de locomotion, et avec l’amélioration de divers chemins et sentiers, de nouvelles portions du sol se sont peuplées d'habitations, donnant ainsi naissance aux quartiers dits de la Cité ou du Vélodrome, et du Préry. 

         Et voici même que d'autres terrains, restés libres jusqu’à présent, sont menacés d'un envahissement aux inquiétantes allures grégaires...

           Enfin, sur les plateaux s'allongeant par delà les crêtes, neuf ou dix métairies sont seules à s'en partager la culture, non sans tenter de faire disparaître, hélas I tout ce qui, encore, peut permettre d’évoquer l’antique forêt domaniale des évêques et princes de Liège. 

             Malgré l'exiguïté relative de son territoire, Ensival permet, à qui¬conque veut le parcourir, de très agréables promenades, fécondes en détails imprévus, en rencontres instructives et en prospects intéressants. 





  ENSIVAL. Vue vers le Nord, prise du chemin de Gérardheid.
 Photo Jules PEUTEMAN. 

         A peine quitte-t-on le centre de l'agglomération, pour s’engager dans l'une ou l'autre des voies d'accès aux points élevés — tels Gérard-heid, Bellevue, le Bois, la Houckaie, le Chant d’Oiseaux et Maison-Bois — que le charme spécial de la localité opère. C'est d'abord, au fur et à mesure de la montée, et si l'on regarde vers le Nord, un moutonnement de toitures et de combles pittoresques sommant un fouillis de façades et de pignons, ici réguliers, là de guingois, dont les matériaux constructifs : pierre brute, pisé, briques diversement patinées, contribuent à former un tout nullement dépourvu de caractère. 

         Non seulement, en effet, les modes¬tes logis et plusieurs maisons patriciennes des XVIIe et XVIIIe siècles s'y mélangent aux habitations plus modernes, mais les usines elles-mêmes, avec leurs hautes cheminées, leurs chantiers et hangars, ne parviennent point à déparer un tableau dans, lequel, heureusement, subsistent d’assez larges espaces garnis de superbes bouquets d’arbres. 

         La tour de l'église paroissiale, qui porte un beau clocher bulbeux corseté de fines ardoises ; le campanile de l’Hospice Sainte-Elisabeth, qu’orne une gracieuse statue de la patronne de l'asile ; la pyramide basse, à quatre pans, couronnant la bâtisse de l’Hôtel communal ; le faîtage élégant des locaux de l’Ecole Frœbel, marquent d’ailleurs, d’un cachet de sobre esthétisme, la physionomie de la bourgade Ensivaloise.


 (Fig. 4.) — ENSIVAl. Beau massif d'arbres dans le parc Godin. Photo Arsène FlNCK (1943). 

                    Mais de nouvelles foulées mènent vite le pédestrian à des altitudes supérieures, et bientôt, par secteurs paraissant mobiles, tant il^ varient d’aspect pour ainsi dire à chaque pas, se découvre une aire immense, qui s’étend depuis les crêtes vaporeuses de Beaufays et de Ninane jusqu’au massifs forestiers de l’ Hertogenwald. 

          Sur ce vaste écran naturel, se distribuent harmonieusement tous les éléments essentiels qui feraient, à eux seuls, reconnaître le pays de Herve : profusion de prairies, dont les sinoples délicats sont couturés de haies touffues : vergers plantureux, dans les calmes ombrages desquels somnolent de petites métairies ; tronçons de routes et de vieux chemins, plongeant soudain dans des dépressions terriennes ; boqueteaux et taillis, étirant en fantaisistes découpures leurs verdoyantes foncées, que l'avidité des tenanciers réduit sans cesse, hélas  par des coupes inconsidérées. 

         Quelques bancs de calcaire grisâtre brochent parfois sur le gazon ou les ronciers ; ils signalent, soit la présence d’anciennes carrières abandonnées, soit celle d'une ligne de railway ; des nappes plus ou moins miroitantes dénoncent les brèves apparitions de la rivière ; tandis que des' centaines de maisons et de fermes éparpillent leurs silhouettes, aux tons cendrés, dans la douceur du paysage. 

       Sur ce fond, d'une richesse aussi simple que généreuse, s'étalent, comme d’énormes vaisseaux à l'ancre, les florissants villages du ci-devant duché de Limbourg, savoir, de gauche à droite : Cornesse, dont le clocher néo-gothique s’élance hardiment vers le ciel ; Wegnez, plus craintif, tapi au haut de sa pénéplaine, mais qu’une rapide prolifération soudera, demain, aux quartiers neufs du Purgatoire et de la Croix-Rouge ; Lambermont, dont les jolies villas s’encadrent d’abondants feuillus ; Grand- Rechain, resserré entre ses pacages et se confondant avec ses gros écarts de Stoquis et des Forbots ; Petit-Rechain, qui projette au Midi son robuste épaulement du Thier et que dominent le Bois-Chaffou et Manaihant ; Battice, tout vibrant encore de l’orage au cours duquel se révélèrent son héroïsme et la vanité d’un système défensif périmé ; Mont-Dison, évocateur de célèbres grands-feux et de pèlerinages courus au sanctuaire de saint Eloi ; Bilstain, quiètement abrité derrière ses futaies de Saint-Jacques ; Henri-Chapelle, haussant la flèche trapue de son églisette, non loin du culmen de Bel-Œil. 

      D’autres juridictions encore interviennent dans le décor émouvant contemplé par l’observateur ; mais il ne s’agit plus, cette fois, que de lambeaux s’insinuant, pareils à de souples lambrequins, entre les finages que nous venons, à l’instant, de citer. Et c’est ainsi que des morceaux de Forêt, d’Ayeneux, de Soumagne, de Xhendelesse et de Mélen nouent le fondu de leurs croupes alanguies aux liserés azurins de Thimister, de Clermont, de Baelen et de Membach. 

          Certains traits un peu insolites méritent aussi d’être mentionnés, à titre de repères incontestablement utiles ; tels sont, par exemple, ceux qui dessinent les hauts; terrils coniques des houillères du Hasard (Rétinne) et de Micheroux ; la belle-fleur du petit charbonnage des Xhawirs ; la tour de l’église de José ; le Pensionnat du couvent de la Providence, à Herve : les arbres-signaux de Biomont ; le gentil manoir de Sclassin ; le préventorium de Tribomont ; le temple Antoiniste des Hautes-Mézelles ; etc.

         A cela, pourtant, ne se bornent point les vues admirables s’offrant à foison au curieux. Vers l’Est, figé dans son isolement hautain, voici Limbourg, jadis citadelle redoutable, capitale d’un domaine princier riche d’une histoire tumultueuse. 

           Plus en deçà, se carrent les faciès jumeaux d Andrimont et de Stembert, que d’importantes coulées de constructions récentes; relient aux confins de Verviers. Celui-ci, dont le juste renom industriel a trop nui, selon nous, à la qualité de centre touristique qu’il est en droit de revendiquer, couvre de ses quartiers prospères le fond et les flancs d'une vallée restée, par places, encore singulièrement agreste. Son site original est susceptible de retenir longuement l'attention. 

       La succession de ses paliers méridionaux, traversés de splendides avenues, conduit le regard charmé, et sans que Ton s'a¬perçoive sensiblement d'une transition, vers les riants cottages et les frais décors de Heusy. Il faut avoir atteint la drève de Maison-Bois, tracée en quelque sorte au sommet de la dorsale séparatoire des bassins de la Vesdre et de la Hoëgne, pour que la vue, maintenant dirigée vers le Sud, embrasse la longue ligne d’horizon qui s’amorce à l’Hertogenwald, déjà nommé, et qui, épousant les arêtes faîtières du val de l’Amblève, va se perdre, là-bas, à notre droite, sur les plateaux bocagers d’ Embourg. Le paysage, de ce côté-ci, baigne dans une atmosphère imprégnée de rudesse et d’austérité. La structure du terroir y est toute en bombements et en profondeurs, en soulèvements et en sinus.

         C’est pourquoi les habitats y sont plus rares et moins peuplés. On devine que l’homme y eut affaire à un sol plus rétif que celui de la région hervienne, à un sol qu’il a fallu violenter et travailler longuement avant de pouvoir l'asservir au rôle de glèbe productrice. Les' terrains plats ou de pente moyenne étant les seuls propices à l’exploitation herbagère, les versants roides sont demeurés l’apanage de la foret, ce qui oblige le campagnard à devoir effectuer des trajets souvent pénibles pour donner les soins nécessaires à ses prés et à son cheptel.

      Le climat est aussi plus froid, et c’est du fait des évaporations continuelles montant des fonds ombreux où clapotent mille filets d’eau, que les,, teintes générales semblent ici plus bleuâtres et que les lointains s’amortissent en des flous de brume et de mystère. 

        Quand le soleil éclaire ce vaste champ visuel, on peut distinguer, d’Est en Ouest, les frondaisons de la Louveterie, de la Borchêne et de Hestreux, voisines des éclaircies de Fouir, de Surister et de Charneux (Jalhay) ; puis s’impose, par son air désolé et tragique, la tache de couleur gris brûlé, indicatrice des Hautes-Fagnes où, par temps clair, on reconnaît le belvédère et les parages immédiats de la Baraque-Michel ; plus à droite, apparaissent Solwaster, Sart, Hockay et Malchamps ; viennent ensuite, par delà le hameau d’Oneux, les gradins du cirque spadois : Sarpay, Géronstère, Bérinsenne, Creppe, flanqués de près par Desnié, Bronromme, Vert-Buisson et Hautregard ; enfin, les visées au-dessus de Sohan touchent Cornémont et les parages de Louveigné d’où, par les méandres de la Vesdre, jalonnés en recul par la ferme romantique de Colonheid (Fraipont) , l’église et le château bourgeois de Banneux, ainsi que par l’enflure fortifiée de Tancrémont, le regard plonge vers la station de Pepinster et le triple ruban de la rivière, de la grande route et du chemin de fer, qui nous ramène à Ensival.

          Ce n'est pas, on le conçoit, sans tâtonnements préliminaires que l’on trouvera les points de vue convenant le mieux à l'observation des endroits ici sommairement dénombrés. 

           L'initiative de chacun aura donc l'occasion de s'exercer librement dans ce genre de recherches. Chemin faisant, l'aspect du sol ensivalois lui-même se sera forcé-ment imposé à l'attention du visiteur. Il réalise un tableau séduisant, sans conteste, de par l'originale disposition de ses profils, l'agencement de ses méplats, coupés’ de ravins et d'enrues , bossués de tertres, sillonnés de très vieux chemins et de sentiers idylliques. Aussi bien, faut-il voir tout cela sous les lumières multiples, prodiguées suivant le caprice des saisons et des heures. L'intimité ainsi créée convaincra, alors, qu' Ensival réserve à tous ses familiers une abondante provende d'impressions délectables et de souvenirs indélébiles,. 




Vue vers le Sud-Est. Dessin de Jean JULÉMONT.

 En 1840, H. DEL VAUX DE FOURON, dans la 2de édition de son Dictionnaire géographique de la province de Liège, attribue à Ensival une étendue de 456 Hi 47 a. 76 ca., dont les prés, pâtures et vergers absorbent environ la moitié de La superficie ; les terres labourables les 3/4 du reste. Vingt ans plus tard, P.-C. POPP, lors de la publication du Plan cadastral de commune d’Ensival, mentionne pour celle-ci une contenance de 457 Ha. 81 a. 65 ca. (dont 432 Ha. 82 a. 53 ca. imposables et 24 Ha. 99 a. 12 ca. non imposables ) et un revenu global de 83.009 francs 44 centimes (dont 20.372 francs 44 centimes pour les propriétés non bâties, et 62.657 francs pour les propriétés bâties). A. JOURDAIN et L. VAN Stalle citent le chiffre de 457 Ha. 58 a. dans leur Dictionnaire encyclopédique de géographie historique du royaume de Belgique ». publié en 1898. 

Quant à Eug. de SEYN, son Dictionnaire historique et géographique des communes belges, paru en 1924, porte la superficie d’Ensival au nombre rond de 458 Ha.  


                  HYDROGRAPHIE 

  Les gués:


Les ponts étant très espacés les uns des autres, en l’absence de bacs, franchir la Vesdre était cependant possible en empruntant les gués, tant que le courant le permettait.

Certains endroits se prêtaient mieux que d’autres à la traversée de la Vesdre. Quelques grosses pierres affleurant à bonne hauteur de l’onde facilitaient le passage des piétons. Un dessin d’Armand Weber représente semblable type de gué, en l’occurrence celui du Trou du Marteau, à Verviers, à peu de distance en amont du futur pont du Chêne.

Le franchissement du charroi nécessitait, on s’en doute, certains aménagements, sur chaque rive, une rampe donnait accès à ce type de gué, formé par un amoncellement de grosses pierres déposées dans le lit de la rivière.

Jules Peuteman fait état de pas moins de sept gués sur la distance d’environ trois kilomètres et demi qui sépare l’Elahan (Ile-Adam) de la Raye. 

La difficulté d’établir des ponts rendait indispensables ces moyens de fortune qui, pour la plupart, allaient , par la suite être  remplacés par des ouvrages d’art.

Le franchissement de la Vesdre, qui, à présent, ne dure guère qu'une demi-minute, requérait autrefois plus de lenteur et de précautions.

 Il s’effectuait par des gués, dont les emplacements sont presque exactement indiqués par nos ouvrages d’art modernes’. il s'agissait: 

 1°) le gué de l'Elahan. Il figure sur un plan manuscrit du XVIIIe siècle. Situé un peu en aval du viaduc de la ligne ferrée Verviers-Herve, il servait au passage du très ancien chemin du Duc, et il était utilisé surtout par les piétons, les cavaliers et le charroi à destination de Hodimont. 

 2°) le gué de Bétibou, constituant un raccourci pour atteindre le Thier de Hodimont et Dison. Il disparut lors de la création du pont dit des Clarisses.

 3°) le gué de Natrô (Renard-Trou), qui existait vers l’extrémité Nord-Ouest de la rue de la Foulerie. Il convenait principalement aux voyageurs venant de Heusy et d’au delà, désireux de gagner au plus court Lambermont et Petit-Rechain. Il est possible qu’une passerelle soit bientôt construite en cet endroit.

 4°) le gué de Francomont, dont se servaient les Ensivalois allant à Lambermont, Grand-Rechain et les environs, en passant par le Pûri Bwès. On voit encore, sur la rive droite de la Vesdre, la rampe pavée ayant facilité le passage des véhicules. En temps normal, les piétons traversaient l’eau en marchant sur de grosses pierres équarries, qui émergeaient d’une vingtaine de centimètres.

 5°) le gué d’Ensival ou du Cherau, qui fut longtemps le plus important d’entre ceux ici mentionnés. Sa rampe d’accès ensivaloise est heureusement conservée ; elle est visible au début de la rue Beau Jardin, à droite et à 50 mètres à peine en aval du grand Pont. Utilisaient ce gué, les gens voulant se rendre à Wegnez, Soiron, etc. 

 6°) le gué du Purgatoire, où la Vesdre se passait à 230 mètres en amont du Pont actuel et où le chemin du Duc abandonnait notre territoire pour tendre vers Pepinster et Liège. On le désignait le plus souvent sous la simple appellation wallonne : le Wez. 

 Un acte, daté du 4 frimaire an XI (25 novembre 1801), nous apprend qu’un industriel verviétois, François-Joseph Delmotte, propriétaire ici du bien dénommé « le Purgatoire », sur la rive droite de la Vesdre, se proposait alors d’établir une foulerie : ce qui nécessitait la construction d’un barrage. Il est ordonné que « ce barrage ne pourra être élevé qu’à fleur et superficie du gravier, de manière qu’il soit 2 centimètres et 9 millimètres, ou un pouce, plus bas que le fond ou niveau du coursier ou canal de bois de la foulerie appartenant à » la veuve de François-Xavier Cornet, née Franquinet, propriétaire en partie de la foulerie de Francval. 

 Le même barrage, qui ne pouvait modifier en rien le lit et la direction de la rivière, devait en outre « être posé précisément dans le gué nommément le \Vezf qui sert présentement de passage sous le nom de « chemin du Duc ». Il mesurait au moins 3 m. 90 ou 11 pieds anciens de sur le travers de la rivière, avec deux bordures en pierre ou en bois, « pavé avec des pierres bien de niveau les unes des autres, pour tenir in ou passage dans le même état » ; enfin, le dit Delmotte ne pouvait ; les bords à établir aux deux extrémités qu'en pente et en talus, sans rétrécir sous aucun prétexte le lit du cours d'eau... ». 

 7°)gué de la Raye, dit également de Sur le Château et aussi de Pîrî . Il assurait la liaison entre les villages franchimontois d'Oneux, de Theux et d'alentour avec Wegnez, les Rechains et le pays de Herve. 


La Vesdre:

  
         La plupart des géologues font remonter à la fin de l’Oligocène, soit dans le milieu de l’ère tertiaire, l'époque durant laquelle s’ébauchèrent les thalwegs qui, après bien des remaniements, devaient aboutir au système hydrographique appelé de nos jours le Bassin de la Vesdre. 

    Ce nom de rivière, que l’on, rencontre, à Ensival, écrit sous les fotmes : Vesde (1595), Vetz (1625), Veste (1650), Vese (1719), Vesse 1726), Vestre (1731), Vece (1745), Weste (1770), et Vesce (1790), doit être d’origine plutôt préceltique que celtique. Il équivaut à l'appellation donnée, notamment, au fleuve allemand le Weser, à la rivière Française la Vézère et à plusieurs autres cours d’eau.

    Qu’il signifie « la bonne eau » ou « la rivière aux eaux claires » c’est parfaitement admissible : la Vesdre ayant charrié, jadis, des ondes d’une fraîcheur et d’une pureté extrêmes. Née de suintements de la Fagne, à plus de 600 mètres d’altitude, au me Nord du Stelingberg, entre Mützenich et Contzen, la Vesdre s’est creusé un lit aussi capricieux que pittoresque, drainant, sur son passage, un très grand nombre de ruisseaux d’une allure non moins remarquable, .

    Après avoir traversé Eupen, contourné l’éperon montagneux de Limbourg ; baigné la ville de Verviers — à laquelle elle doit surtout l’infâme pollution de ses eaux — elle atteint Ensival sur un plafond axial de 50 m. 90 d’élévation au-dessus du niveau de la mer .

    A partir de ce point, et sur une longueur totale de 3793 m. 50, elle sert de limite à la commune, séparant ainsi cette dernière des territoires de Lambermont et de Wegnez, situés sur la rive droite. L’issue se faisant à la cote de 137 m., il en résulte que la nappe liquide s’abaisse de 13 m. 90, e qui représente une moyenne de o m. 34 pour cent mètres de parcours. Il faut tenir pour exactes les indications de TARLIER, d’après lesquelles la Vesdre, qui est large de 15 à 20 mètres, a une profondeur moyenne de 40 centimètres ; on observe, sur les maigres, de 15 à 20 centimètres d’eau ; dans les goffes ou mouilles, plus de 80 centimètres. En été, la hauteur de l’élément liquide est en moyenne de 20 cm, ; en hiver, de 70 cm.

       Elles ne fut pas qu’une frontière d’Etats; en des temps lointains, elle pouvait, à l’occasion, se transformer en une barrière quasi infranchissable. Cette seule rivière qui borde Ensival n’a jamais été navigable dans son parcours verviétois.


   D’un débit irrégulier, la Vesdre en outre, et de longue date, vu son cours entravé par plusieurs barrages érigés pour les besoins de l’industrie textile. Ce n’est qu’au XVIe siècle, à partir de Fraipont, que des bateaux à fond plat ( bètchettes ou batches) permirent le transport des marchandises vers Liège. 

              La vallée de la Vesdre, avec ses chemins cahoteux, mit longtemps à pouvoir disposer d’une route carrossable; la rivière y suppléait. Il est certain que ces barques servirent également au transport des personnes. Faut-il faire également remonter à la même époque un service de passage de la rivière par bac, la barque pouvant véhiculer douze personnes, et qui existait à Vaux-sous-Chèvremont, fontaine, La Rochette, La Brouck, Prayon, Trooz, Fraipont et Nessonvaux. 

   Ce service existait avec certitude, au début du XIXe siècle, ainsi que le signalait un tableau dressé le 30 frimaire an XIII (21.12.1804) par l’administration des Ponts et Chaussées. Cette navigation n’était pas toujours sans risques. 

      On connaît la fin heureuse de la mésaventure survenue à Juste Lipse qui, se trouvant aux eaux de Spa en 1595, dut fuir précipitamment la ville d’eaux par suite de l’arrivée impromptue d’un parti de cavaliers hollandais. C’est au quai d'embarquement de Fraipont qu’il prit place dans une de ces bètchettes pour gagner Liège.

      On a, par contre, perdu le souvenir de la fin tragique de ces dix habitants de Trooz qui, en novembre 1769, revenant de la foire de Forêt, s’avisèrent bien mal à propos de traverser les flots de la Vesdre grossis par les intempéries. Leur barque alla se fracasser contre une muraille entraînant dans la mort tous ses passagers.

     
  On avait, dès le XVIIe siècle, envisagé de reporter de Fraipont à Pepinster et même à Ensival la navigation sur la Vesdre. « Certains zélés du bien public » avaient obtenu, le 30 septembre 1669 de Maximilien-Henri de Bavière le privilège d’effectuer à leurs frais les travaux nécessaires à cet effet moyennant l’octroi exclusif de navigation et de trafic sur la Vesdre pendant un durée de vingt ans. 

      Ils avaient préalablement obtenu semblable autorisation des Provinces Unies et du roi d’Espagne. Le projet ne connut pas de suite, pas plus que celui de Laurent-François Dethier qui, en 1797, engageait la municipalité de Verviers à s’intéresser à rendre la Vesdre navigable de Fraipont à Pepinster, tout en reliant cette localité par la route à Theux et à Verviers. Dethier reprit cette idée en 1814 et 1817. L’industrie aurait trouvée profit dans cette extension de la voie navigable; la construction de la route de la Vesdre en 1824-1826 fit abandonner à jamais de telles initiatives.

           Par le rattachement d’ Ensival à Verviers, un tronçon supplémentaire de la Vesdre est inclus dans la nouvelle agglomération : à l’Est, la partie Nord, limite entre Andrimont (Dison) et Stembert (Verviers) ; à l’Ouest, les rives du côté de Lambermont au Nord et d’ Ensival au Sud, aujourd’hui Verviers de part et d’autre jusqu’à la limite, au Pont du Purgatoire, entre Verviers et Wegnez (Pepinster). 

             Venant d’une direction Nord-Nord-Ouest à Sud-Sud-Est, la Vesdre aborde Ensival au bas de la grand route Liège-Verviers, à 20 mètres en aval du Pont de l’Elahan (vulgo : Ile-Adam). 

           Les murs de quai et le perré qu’elle y rencontre forcent aussitôt ses eaux à se détourner vers l’Ouest. Il y a un siècle à peine, la rivière venait battre le pied même des rochers de la Heid des Fawes — dont le massif se prolongeait, sur Verviers, jusqu’au bas de la rue d’Ensival actuelle — et les affouillait fortement.

         La création de la voie ferrée de Liège à Verviers, d’abord ; celle de la ligne de Verviers à Herve, plus tard ; de même que l’amélioration de la route nationale et la construction de maussades bâtisses industrielles sur la rive lambermontoise, ont enlevé à cette partie du cours de la Vesdre le caractère d’âpre sauvagerie qu’elle avait gardé jusqu’alors. 

          Au bout de quelque 190 mètres, pendant lesquels elles courent quasi parallèlement à la route, un nouvel abrupt de la colline oblige les eaux à se diriger vers le Nord-Ouest. C’est le point de départ de lalarge boucle saillante, dont le développement, de 1500 mètres à peu près, enserre tout l’important quartier du Bois Godin. La Vesdre prend ensuite une direction générale de Nord-Est à Sud-Ouest, non sans dessiner toutefois diverses courbes assez brusques, comme celles que l’on peut constater : 

 ENSIVAL.

          La Vesdre au pied de la Heid des Fawes. (1947). 1°) à l'aval immédiat du Pont du Purgatoire ; 2°) devant l'ancienne carrière dite Pîrî Fouyat (Wegnez) ; 3°) à La Raye, au Sud-Est de la plaine alluviale de Vovegnez (Wegnez). Toutes les phases du processus de la formation des1 vallées sont facilement observables, soit des berges accessibles, soit des ponts jetés sur la rivière : tendance du courant à creuser ou à éroder les rives concaves ; alluvionnement des rives convexes ; rétrécissement du lit dans les boucles ; élargissement de la nappe liquide dans les parties rectilignes du trajet.

       Tant que les plateaux et les pentes de son bassin supérieur restèrent abondamment boisés, la Vesdre conserva un débit assez régulier ; mais, à mesure que s'étendit l'aire des essartages, notre vallée eut à craindre les crues subites et désastreuses causées par les pluies prolongées, la fonte rapide des neiges, ou les orages violents. 

      Voici quelques échos de ces colères fluviatiles : En l'année 1315, de fortes inondations causèrent aux riverains des pertes d'autant plus sensibles qu'elles s'accompagnaient des souffrances consécutives à la famine et à une épidémie meurtrière . Dans le courant de 1349, les mêmes fléaux se manifestèrent avec une activité renforcée . 

      Le 10 août 1496, les eaux, tellement grosses qu'elles emportèrent le pont de Hodimont, à Verviers, provoquèrent les plus vives alarmes chez tous les habitants de la partie basse d' Ensival . 

    En 1562, c'est le pont de bois d' Ensival, qui se démembre sous un assaut irrésistible du courant et voit toutes ses pièces emportées à une allure vertigineuse. L'inondation du 15 janvier 1643 compte parmi celles dont le souvenir resta singulièrement vivace. Non seulement la vallée de la Vesdre fut grandement éprouvée, mais l’Amblève, l'Ourthe, le Hoyoux et la Meuse répandirent aussi la panique sur leur passage.

     Un gonflement soudain de la Vesdre, le 2 juillet 1723, anéantit la digue du moulin de Verviers. Le même événement se reproduisit le premier septembre 1725. Ensival, toutefois, semble n'avoir pas été particulièrement affecté par ces deux crues . Le premier janvier 1737, l'eau emporta la grande nacelle appartenant à la veuve J.-B. Franquinet, de Francomont ; cette barque, qui « avoit été faite pour aller spaumer [rincer] les laines sur le by » ou canal voisin, vint se briser contre une arcade du Pont d' Ensival et ne fut plus en état de servir .

        Le 11 juin suivant, un certain Henry, de Lambermont, périt en l’endroit dit Quatton, au-dessus de Renard-Trou, par suite d'une crue subite de la rivière ; le corps fut retrouvé le surlendemain, près de Pepinster . 

        Le 27 mai 1738, la Vesdre déborda de telle façon, qu'elle inonda le Wérixhas (Grand Place). C'est la première fois qu'on la voyait aussi forte, depuis la construction de maisons sur Francomont (1723-1725). Le 10 août 1740, la procession ensivaloise de la Saint-Roch ne put avoir lieu, parce que les eaux, moins hautes pourtant qu'en 1738, couvraient de nouveau le Wérixhas .

      Partiellement inondé le 19 octobre 1751, le bourg fut encore, le 19 novembre 1753 envahi par la Vesdre, à laquelle, cette fois,, se mêlèrent, les flots du Préry fortement grossi .

     Les dégâts causés aux riverains furent des plus considérables. Les 12, 13 et 21 décembre suivant, soit trois fois en neuf jours, la rivière traversa la localité

    Un débordement, qui dura 23 heures, se produisit le 30 décembre 1763 ; sa violence fut si grande qu'il renversa nombre de murailles et détruisit plusieurs maisons ; le cadavre d'une femme, noyée proche de Limbourg, fut aperçu, passant au fil des ondes déchaînées, et ne put être repêché qu'à Fraipont. Trois jours plus tard — conséquence vraisemblable d'affouillements insidieux — une partie de la Heid des Fawes s'écroula, entraînant des masses de rochers d'une grosseur prodigieuse.

        Inondé de midi à 10 heures du soir, le 25 novembre 1769, Ensival vit renaître, à deux jours d'intervalle, la même inquiétante invasion .

        Le 15 août 1770, notre commune connut les effets désastreux d'une pluie torrentielle qui s'abattit sur la région. En peu d'instants, les ruisseaux de Mangombroux, des Rouettes et du Préry s'enflèrent et, renversant tous les obstacles à leur course précipitée, occasionnèrent des dommages dont le montant, pour Verviers seul, fut estimé à 200.000 florins de Brabant 
.

   












ruisseau de Mangombroux     
                                                                                       Le préry                              
                                                                                  


     














          Cinq ans après, le 6 août, une crue plus fameuse que toutes celles subies depuis un siècle, commença à toucher Ensival dès 10 heures du matin, pour décroître seulement au soir. Les eaux s'étendirent « jusqu'au pied du jardin du révérend Mr Jonckeau, jointant au cimetière », c'est-à-dire au pied de l'église. Les dégâts furent incalculables, car, outre deux maisons renversées à Eupen, les murailles culbutées, les jardins ravagés, les rames et matériaux légers emportés comme fétus de paille, les marchandises gâtées dans les magasins et les caves lésèrent presque tous les riverains. Il n'y eut, heureusement, point de victimes humaines . 

     Enfin, le Ier août 1781, pendant un orage terrifiant, au cours duquel tombèrent des grêlons, dont l'un atteignait le poids de 3 quarterons (3/4 de livre), le Préry déborda avec tant d'impétuosité qu'il se répandit dans la Grand ville et causa d'importants dommages à la communauté et aux particuliers . 

    Pour remédier autant que possible à ces inondations fréquentes, les propriétaires des terrains en bordure de la rivière érigèrent, soit d'épais ouvrages de maçonnerie, soit de simples murs de pierres sèches, étayant des amas d'argile battue et de gravier. Quant aux larges brèches subsistant entre ces travaux défensifs, on tâchait de les colmater en y amoncelant des décombres; et des immondices. Peu à peu, de la sorte, la rive ensivaloise se suréleva et devint moins sujette à être recouverte par les eaux. 

         large et profonde vallée du préry

   
















Nous sommes mieux armés, à présent, contre les crues calamiteuses ; néanmoins, les fortes venues d’eau, comme, par exemple, le débordement survenu en l’an V ; celui de thermidor an XI ; les crues du 7 au 8 septembre 1810 (18) ; du 3 mars 1831 ; du 3 février 1850 — qui emporta le Pont Walrand et le pont suspendu des Masures, à Pepinster — et enfin celles de 1880, de 1906, de 1914, de 1926, du 3 mars 1931 et du 6 avril 1947, ne furent pas sans inquiéter vivement les habitants de la vallée, dont beaucoup subirent des préjudices plus ou moins grands. 

     Chaque fois, se renouvela aussi, alors, le triste mais pittoresque spectacle d’occupants des immeubles inondés sortant de chez eux, ou y rentrant, au moyen de charrettes, d’échelles, de bancs, de chaises, etc., sous les regards amusés et les quolibets des loustics.

     En période normale, cependant, la Vesdre n'entraîne guère que des eaux lentes et sales, recouvertes, aux surfaces étales, d’une couche graisseuse, qui se plisse comme la peau de l’éléphant et que crèvent des bulles nauséabondes montées des boues fermentantes du fond. Aussi, conçoit-on mal l’inertie du public et, surtout, celle des Administrations communales intéressées ; c’est à cause d’elles que, depuis près d’un siècle déjà, l’une des plus admirables vallées du pays est enlaidie et infectée par le fait du sans- gêne de quelques puissants usiniers. Et qu'on ne dise pas — écrit à ce sujet Emile GENS — que le mal est nécessaire, que les industriels ont tous droits sur les rivières et que la prospérité de l’homme ne peut s'établir sans infliger d’irréparables affronts à la nature primitive.

       Il n'en est pas ainsi, ou la science n'est plus la science. Si l'homme a le droit d'employer les forces de la nature, il ne peut pas être permis à quelques industriels de déshonorer une vallée entière sans chercher à réparer le mal qu'ils font, sans chercher à rendre au pays la fraîcheur et la santé. 

    Faites travailler l'eau ; attelez à vos machines ce moteur infatigable ; mais, par fierté pour vous-mêmes, épurez, filtrez, rendez aussi claire que possible cette eau qui vous fait vivre. Que les boues de vos égouts, que vos résidus industriels, transformés par les moyens chimiques, servent à féconder les terres. 

     De la corruption, faites sortir la vie, non la maladie et la mort. Si vous ne souffrez sans honte que les abords de vos maisons soient salis par mille résidus, ayez la même pudeur pour vos villes. Les rivières, après avoir travaillé dans vos usines, ont un autre rôle à remplir : celui de rafraîchir et de vivifier l'atmosphère, de porter avec elles les bienfaits des eaux courantes, c'est-à-dire la verdeur des prés et des bois, la santé des troupeaux et la santé de l'homme lui-même. 

      Alors, vous aurez fait acte de justice, acte de rédemption. Vous aurez relevé, retiré de la honte la belle ondine sauvage et forestière qui vous a comblés de ses bienfaits, qui vous a fait prospères et riches et dont vous avez depuis longtemps souillé la robe blanche... Page émouvante, assurément, mais que — comme bien d'autres écrits, d'ailleurs — nos législateurs, mus par des soucis électoraux plus impérieux, perdent très volontiers de vue et... Pourtant, on ne saurait trop le répéter : « Une rivière impure, polluée, est un attentat au bien de tous et une souillure insupportable. Elle fait honte à un Etat» .

      Mais n'est-il pas également vrai que les populations riveraines sont des plus coupables, elles aussi, puisque les hommes ont les administrateurs qu'ils méritent

         Sous le titre les pont de Verviers la rectification du cours de la Vesdre est précisée. 

           Sous leurs titres respectifs, le Préry à Ensival et le Fierain à Lambermont, font l’objet d’une description. 



Le ruisseau du Préry


Parmi les affluents ensivalois de la Vesdre, le seul qui puisse vraiment être considéré comme ruisseau, est le Préry (le Ry des Prés).

  Ce nom, dont le terme déterminant précède le déterminé, indique une formation qui remonte, chez nous, au moyen-âge ; nous le trouvons orthographié Preit ry en 1567, Preit Riex en 1639, Preitry en 1735, et Prezry en 1744. Le plus souvent pourtant, dans les anciens actes locaux, on désigne ce petit cours d'eau sous le simple vocable de Ry ( 1502, 1517). Le 10 avril 1510, il est question du « ry pasant oultre Annesyvalz » ; en 1539, est cité le « ru y dudit Ennesyval » ; en 1573, paraît «le rieu du dit Ensivaulx », qui devient « rix » en 1639.

Le Préry est formé par le produit de plusieurs sources, s'alimentant à la vaste nappe aquifère qui s'étend, souterrainement, depuis le plateau du Jonckeu (Polleur) jusqu'aux abords des locaux actuels de la Sapinière, à l'orée du Bois de Sohan (Pepinster). La branche majeure du ruisseau prenait anciennement naissance à la limite orientale d'Ensival et de Theux, soit à quelques mètres à gauche du chemin de Verviers à Oneux.

L’amélioration de la voirie et la transformation du feuillu en prairies, ont fait dévier de sa direction l'épanchement initial, dont le tracé, néanmoins, reste encore bien visible. C'est donc à une source secondaire, sortant d'un petit bassin moussu, creusé à un niveau d’une trentaine de mètres inférieur à celui du suintement primitif, que se trouve actuellement le point de départ du Préry.

Vite grossi par rapport de quelques filets d'eau, descendant presque tous de gauche, le ruisseau, qui d'abord tendait vers l'Ouest, s'infléchit peu à peu vers le Nord, et, après un trajet de 1100 mètres environ, pendant lequel son lit s'est abaissé de quelque 70 mètres (soit de 6,36 %), il arrive au lieu dit Piévache ou Piedvaehe, entre le hameau du Bois et les K’mognes, et il y opère sa jonction avec sa branche complémentaire.

Celle-ci, longue de 9oo mètres à peu près, est communément appe­lée le Piévache, parce que baignant le vallon ainsi dénommé. Mais beaucoup d'habitants étendent au cours d'eau tout entier cette dénomination bizarre. Conçoit-on, en effet, qu'un ruisseau puisse s’appeler Pied-vache (wallon : Pîd~vatche) ? Je crois plutôt que ce nom est une déformation du mot patois Pihe-vatche (Pisse-vache), dont l'analogue « Pissevache » était donné, nous apprend J. HAUST, à une ancienne rue de Liège ; ceci nous convainc que le toponyme ensivalois devrait également se traduire en français par Pissevache. Songeons à d'autres noms régionaux bien connus, tels que Pisseroule (Dison), Picherotte (fontaine à Verviers, citée en 1702), Picherote (affluent du Wayai, à Spa), Pisserotte (tributaire de l’Ourthe, né sur Villers-aux-Tours) , Pissevache (signalé par J. Herbillon, dans la commune de Villers-l'Evêque), etc.

Sourdant à 500 mètres au Nord de la ferme de Maison-Bois, cette seconde branche du Préry a un cours moins sinueux que celui de la première. Ses eaux animent, de leur clapotis incessant, le chemin encaissé qui, du Fond de Piévache, monte vers la cépée des Sept Fawes, à travers un site délicieux parcouru, à la bonne saison, par de nombreux admirateurs.

Ainsi renforcé, le Préry se rapproche alors du pied de la colline des K'mognes, où il cache ses miroitements sous les branchages ébouriffés d'aulnes glutineux et de saules. Ce seront, malheureusement, ses derniers moments de liberté. Au bout de 300 mètres, en effet, à l'endroit où le vallon s'élargit et se peuple, dessous l'ancien Bois Duvivier, il est requis de prêter ses eaux jeunes et frétillantes au Bassin de natation local : construction dont les murs de clôture, en béton, gagneraient beaucoup à être drapés d’ampélopsis ou d'autres verdures, afin de masquer l'aspect vulgaire du matériau artificiel.

Immédiatement à l'aval de l'établissement précité, le sentier n° 17, menant de la Houckaie vers le Bois, enjambe le ruisseau par le moyen d'un ponceau de pierre, dont l’ouverture Nord marque le point à partir duquel le Préry est soumis au régime de la loi du 7 mai 1877 relative aux cours d'eau non navigables ni flottables. A partir d'ici, également, et pour le restant de son trajet, soit une longueur approximative de 900 mètres, le Préry devient inabordable, coupant des propriétés communales ou privées. A peine encore un peu visible, il arrive à la base Sud-Ouest de l’escarpement de Donheid, ce qui le force à se déporter légèrement à gauche. Mais, déjà, c'en est fini du joyeux défilé de ses vaguelettes transparentes. L’éclosion récente du quartier du Préry, et la transformation radicale de la vieille rue du Canal, ont fait disparaître sans pitié la partie basse de l’aimable ruisseau. Celui-ci, désormais mué en égout collecteur, ne charriera donc plus que des eaux résiduaires. Complètement voûté, il passe sous la ligne du chemin de fer, puis, par la rue de la Station, le carrefour du Ponçay, les rues de l’Eglise et de la Maison commune, il atteint la Grand Place, qu’il traverse en diagonale pour aller vomir dans la Vesdre, sous la culée Sud du grand Pont, toutes les saletés recueillies sur son passage parmi les hommes.

A partir de l’extrémité Sud de la rue du Canal actuelle, c’est à dire dès qu’il atteignait l’agglomération, le ruisseau était enjambé par de nombreux petits ponts de pierre ou de bois, élevés, pour leur propre facilité, par les riverains eux-mêmes.
Ses crues soudaines, par suite d’orages violents ou de dégels brusques, le rendaient parfois redoutable ; il amenait notamment, devant le vieux Christ du haut de la rue, des tas énormes de bourbe, de gravier et de sable.

Le Préry a joué dans l’histoire locale un rôle fort important. Aussi est-il hautement souhaitable de voir interdire, dorénavant, toute mesure attentatoire à l’aspect de la partie restant libre encore d’un gracieux ruisselet, dont le rôle bienfaisant fut si apprécié jadis et qui, dans le paysage local, apporte tant de beauté, de fraîcheur et d’ingénuité reposante. Mourant sur le sol qui le vit naître, le Préry est comme le symbole du véritable Ensivalois, lequel, en tous lieux et toujours, demeure fidèle à son terroir.
.

Outre le fait qu’il marquait la limite entre les bans de Verviers et de Theux, le ruisseau était un élément caractéristique de la localité. Les Ensivalois avaient fort à faire avec ce petit  cours d’eau capricieux. Il fallait entretenir une demi-douzaine de ponceaux et deux aqueducs s’étendant sur quelque 150 mètres.

 En 1799, la municipalité évaluait à 350 francs les frais de curage de ce “canal”. Cette besogne s’effectuait tous les trois ans; hélas, depuis 1792, cette pratique avait été abandonnée et, le 8 juin 1815, un orage dévastateur se déchaîna sur la cuvette ensivaloise. 

   Plusieurs maisons s’effondrèrent, le ruisseau déborda en emportant furieusement quais, aqueducs, ponceaux, pavés. Tout était à refaire, les réparations exigeaient des sommes considérables.

Un rapport de la municipalité au sous-préfet, daté du 28 fructidor an IX (15.9.1801) évoque ce ruisseau du Préry, réduit trop souvent au rôle d’égout. D’énormes tas de fumier obstruaient les rues, “répandant des exhalations infectes d’où pouvaient naître les maladies plus graves”. A chaque averse, le ruisseau charriait une eau malodorante.

Pour comprendre cette situation, il faut tenir compte de ce que, même à Verviers, il n’était pas rare de rencontrer des petites exploitations agricoles en plein tissu urbain.

Une ruelle de l’abreuvoir  reliait jadis la Grand Place à la Vesdre, pour permettre d’y conduire le bétail des étables voisines.

    La salubrité publique laissait à désirer et la municipalité avouait son incapacité à contraindre les habitants à enlever ce fumier. Déjà en 1718, le Magistrat en appelait au prince contre les manants qui, non seulement déposaient du fumier dans les rues, mais y creusaient même des fosses d’aisance. Au siècle suivant, le fumier subsistait, bien qu’en 1814 on tenta d’assainir les rues de la bourgade; une adjudication eut lieu pour l’enlèvement de ce fumier.

      L’expérience  fut-elle renouvelée les années suivantes? Nos voisins verviétois n’étaient pas mieux lotis .En 1745, le Magistrat déplorait la présence de fumier dans les rues et même dans les fontaines et sur les rives de la Vesdre. Au Vieil Hôpital, l’hospitalier avait aménagé un local à l’usage de la  porcherie. Le service d’enlèvement des immondices était encore à venir; il sera réalisé à Ensival en 1844; chaque samedi, un adjudicataire se chargeait de cette besogne.


Les habitudes urbaines prenaient du temps à s’installer.


Le Curé d’Ensival élu par la population.



           De notre temps, où il est sans cesse question de l’opinion publique et des moyens de la constater, il peut être curieux de rappeler avec quelle simplicité on parvenait jadis à en obtenir l’exact résultat, dans un petit canton du pays de Liège.

         En descendant la Wèze, on trouve à une demi-lieue de Verviers, un vallon assez étroit, qu’occupe le bourg ou village d’Ensival. En 1657, Ferdinand de Bavière, prince évêque de Liège, y établit une cure à laquelle la commune eut le droit de nomination.

         Cette élection se faisait, dans l’origine, par le corps des habitants. Les notables du bourg, après avoir assemblé le peuple sur une place que partageait un petit ruisseau, lui présentaient successivement les candidats. A chaque présentation, ceux à qui l’aspirant était agréable , sautaient de l’autre côté du ruisseau, de façon que le prétendant en faveur duquel le plus grand nombre avait sauté, était proclame curé d’Ensival.

      Cette cérémonie, conforme à l’usage où les fidèles étaient, dans les premiers siècles du christianisme, de nommer dans les divers degrés de la hiérarchie à la pluralité des suffrages, n’eut plus lieu dans la suite; et l’élection se fit par les tuteurs et administrateurs de l’Église.

Magasin Pittoresque, tome premier, 1833





Le HEPTENRY, ry des ROUETTES, ou ry de SEROULE.




           Formant, sur une longueur de 400 mètres à peine, limite entre notre commune et Heusy, ce ruisseau, d’allure moins rude et moins espiègle que celle de son voisin le Préry, n’appartient qu’en raison de sa mitoyenneté à l’hydrographie d’Ensival.

         Il naissait jadis du plateau qui s’étend au Sud immédiat de l’église actuelle de Heusy, et il s’appelait le Heptenry, nom que la plupart des actes de la Cour de justice de Verviers lui conservent pour tout son parcours à l’air libre. On trouve, notamment : Heptenri (1439), Heptemiwe (1454), en Heppeten ry (1468), en Heptenruy (1471), Heptenry (1596).

       Le 6 février 1609, Pirotte le petit Pirotte d’Onsivaulx, cède à Thomas de Hasseux le jeune, du même lieu, un circuit de pré mesurant 52 verges petites, situé en Heptenrieu).

          Mais, du fait que plusieurs autres filets d’eau, coulant plus en aval, au fond de ravines déboisées, viennent s’unir au Heptenry, qui cesse dès lors d’être reconnaissable, le ruisselet a été aussi appelé les Remettes, du nom de l’endroit traversé par ces diverses dépressions du sol connues, en Wallonie, sous les termes roua ou rouwâ, d’où le diminutif rouette ou rwète.

        J'ai rencontré ce dernier hydronyme écrit sous les formes è Roitte (1515), Roite (1535), Ruwette (1574) et Roittes (1610). 

        En 1735» Henri-Joseph Nicolet de Grandpré, demeurant à Heusy, possédait, entre autres biens, une prairie de 350 verges petites, sise près des sources de notre ruisseau et dite Leroitte. Le 7 juillet 1592, un record émanant de la Cour de justice de Verviers spécifie que « les preits à la Fosse montant sur la voie de Vervier, en entrant souz le troux Sotey et en allant hors au ry des Rouettes et jusque à la hai Jean Pirotte étaient redevables de la dîme au profit du curé de Verviers .

       Après avoir franchi le vieux chemin menant de Heusy vers la Houckaie, le Heptenry prend une direction générale allant de Sud-Est en Nord-Ouest. 




                                                                                
        Il baigne ainsi la région  ocagère qui fut le vaste
domaine de Séroule, dont les propriétaires, les chevaliers de Goër de Herve, embellirent grandement l'aspect en y créant six pièces d'eau, qui devinrent très poissonneuses.

        



                 
Depuis le morcellement de la propriété, les deux viviers les plus proches de l'amont ont été convertis en prairies, dans lesquelles tout promeneur attentif reconnaîtra sans peine le contour des dits réservoirs.

         Des trois étangs encore aujourd'hui existants, le plus étendu forme, à coup sûr, le joyau du parc de Séroule, qui appartenaient aux Ursulines ; sa surface, toutefois, a été déjà fort réduite. Des dénivellations variant de deux à cinq mètres environ séparent chacun de ces étangs.

         Quant à la grande pièce d'eau située à l'extrême aval de Séroule, elle est disparue ; on est en train (juin 1950) d'y déverser terres et déblais, pour construire, sur son emplacement, des habitations de tout genre. C'est ici que se perdaient, dans plusieurs fissures du calcaire sous-jacent, une partie des eaux du ry des Rouettes ; l'autre partie étant absorbée par les égouts de la rue voisine. 

        Il est regrettable que, à l'époque de la création du quartier dit du Vélodrome, les Services publics n'aient point songé à promouvoir des recherches spéciales quant à la possibilité de découvrir l'un ou l'autre couloir naturel d'évacuation du ry des Rouettes. 

         Car le proche voisinage du Trou des Sotais (sur Verviers), où se remarque l'un des plus beaux anticlinaux de la région, de même que la présence de nombreuses pierres corrodées et perforées, permettaient de conclure que le sous-sol contenait ici des cavernes plus ou moins vastes. Et déjà, en 1885, Toussaint BRITTE, chef-fontainier de la ville de Verviers, publiait ces lignes, qui restent intéressantes malgré leur manque de précision :

..
. Sur la route de la Houckaie, en faisant des travaux, on a mis à jour le sommet d’une salle d’assez grande profondeur. Au boulevard Hanlet, en amont du Pensionnat de Séroule, les égouts déversent leurs eaux dans plusieurs crevasses qui, d’après mes observations, doivent communiquer avec la salle de la Houckaie.

D’autre part, feu Fernand FüNCKEN, modeleur à Ensival, écrivait, en 1937


: En aval de l’étang, face au Trou de Sotais, vers l’immeuble Lemestré, existe une portion de terrain où sont entreposées des poutrelles. On m’a dit, alors que j’étais gamin, que l’eau de Séroule se perdait dans cet endroit, qui était vaste et dangereux. On y versa des centaines de tombereaux de terre et de pierres, sans parvenir à le combler. Il conserve encore une forme concave, qui passe maintenant inaperçue. Donc, d’après ce qu’on disait alors, il y avait ici un pertuis ou Agolina...


Les lieux dénommés : trou de la Hèye. fosse des Chiens et Lez- Fontaines, que nous signalerons plus loin, nous donneront l'occasion de revenir sur le cours occulte du ruisseau des Rouettes.


Quant à ce bel étang de Séroule, qui fut le théâtre de tant de parties de canotage, de patinage, de fêtes de nuit et surtout de pêche, son souvenir, embrumé déjà, va demain s’évanouir avec les derniers miroitements de la grande nappe fraîche et frissonnante, parsemée d’îlots de nénuphars, de potamots et de lenticules. C’est le cas de rappeler que rien ne dure !


                                      Les fontaines 

           Depuis des lustres, à Ensival comme partout, trouver de l'eau potable était un priorité mais heureusement dans notre région  de nombreuses sources avaient été transformées en fontaines. Nous allons tenter de les retrouver:


FONTAINE al DAM’ZELE ou aux OURSIONS.

 Le fléau du déboisement est la cause indéniable de la disparition de cette fontaine, dont les noms mêmes ont sombré dans le plus profond oubli.
Dam'zèle, terme wallon, équivaut au Français damoiselle.
On serait facilement tenté de se demander quelle poétique légende, quel souvenir émouvant ont pu faire naître cette appellation remarquable. Je suis, pour ma part, porté à croire que le nom provient de ce que la fontaine en question se trouvait enclose dans un terrain appartenant à quelque dame de qualité, laquelle aurait fait aménager le point d'eau pour la commodité de l'exploitation.

J'ai trouvé, en effet, que, le 15 avril 1432, « damoisel Johan[ne] de Jalhea et Carboucke, son mari », comparurent devant la Cour de justice de Verviers, où ils transportèrent à Johans Lonhierne, fis à ladite damoiselle « Johanne », les huniers de tous les biens héritables qu'ils possédaient à Ensival Le fait que ce transport s'effectua par l'échevinage verviétois, prouve que les biens précités gisaient en deçà de la rive droite du Préry et de sa branche orientale : limite juridictionnelle.

Il est vraisemblable que cette mystérieuse fontaine sourdait à proximité du sommet du Chant d'Oiseaux, et qu'elle aura été remplacée par le puits que l'on voit aujourd'hui à quelques mètres au Sud-Est de l'ancienne ferme Nagant, à main droite du chemin vers Polleur. Au même endroit, passe une couche affleurante de poudingue : matériau qui, on le sait, était utilisé pour la fabrication de meules. Or, le mémorialiste Ensivalois LAMBERT nous apprend ce qui suit, dans ses annales si instructives :




24 janvier 1738. — Le jeune Arnold Bertholemy, natif de Cornesse, eut le malheur d'être écrasé, en tirant des pierres proches de la fontaine al Damselle, au dessus d'Ensival.,
Une légère dépression du sol, visible dans les prairies situées un peu au Nord-Ouest de la dite ferme, montre encore assez bien le trajet de l'ancien débord de la fontaine, cherchant sa jonction à la rive droite du Préry oriental, non loin en aval de la ferme Sainte-Marie.




      La fontaine al Dam'zèle portait aussi le nom de « fontaine aux Oursions ».
Cela résulte d'une autre mention de l'accident mortel rapporté ci-dessus.

Le registre paroissial n° 11, page 18, conservé à l'Etat-civil d'Ensival, contient en effet ceci :

1738. — Le 24 janvier, est mort, étant accablé d’une mine de pierres ou terres, honête Arnold Barthélémy, travaillant aux pierres dans notre paroisse, près de la fontaine aux Oursions, et ainsi tué. Nous avons célébrer les obsèques le 27. Rq. in pace.


Je retrouve plus tard le nom de la même fontaine sous une graphie très différente : le 28 janvier 1779, la communauté d'Ensival s'engageait à laisser à celle de Stembert la jouissance du mort-bois dans 60 boniers en forêt, « dans quels sera compris et expressément réservé le terrain qui se trouve depuis la fontaine des Airsillons jusqu'à l'endroit appelé Go dri... ».

La différence entre les deux graphies serait moins sensible si la seconde permettait de lire : Oursillons au lieu de Airsillons.
Les dictionnaires wallons de J. HAUST et de J. WlSIMUS ne citent pas le mot « oursion ». S'agirait-i] ici d'une déformation du nom lûrson ou lotir son, qui sert, dans les régions de Verviers et de Stavelot, à désigner le hérisson ?...




FONTAINE aux TILLEULS

      Les Ensivalois ne la connaissent que sous le nom wallon de Fontinne âs Tyous.





       Cette fontaine est le produit de suintements qui apparaissent, à l'altitude de 320 mètres environ, au Nord de la ferme de Maison-Bois et à 250 mètres, à peu près, de l’angle Nord-est de celle-ci. Bientôt, ces veinules se concentrent dans une grande vasque rectangulaire en pierre, qu'encadraient quatre vieux tilleuls, maintenant coupés. Ces arbres avaient dû être majestueux, à en juger par la surface des souches subsistant niveau du sol.


Seule, pensons-nous, la famille Biolley, propriétaire du terrain avait pu faire aménager, il y a une centaine d’années, cette belle font ombragée, qui servait surtout à l’abreuvage du cheptel voisin.

L’excédent liquide, se dirigeant vers le Nord-Est, traverse en actuellement un petit bois d’épicéas, par une tranchée profonde, a1 d’aller se perdre dans le Préry oriental (rive gauche), à 200 mètres! En amont de la ferme Sainte-Marie.

Godri

        L’endroit dénommé « so Godri » est situé à l’Ouest du plateau dont la base sépare les deux branches du Préry.         

         Il est bien connu des oiseleurs, qui recherchent cet emplacement pour venir y tendre leurs filets,Mais je n’ai trouvé que rarement une mention écrite de ce nom.

  Désigne-t-il un court filet d’eau qui, jadis, en dégringolant la pente boisée, aurait provoqué dans le roc la forte entaille par laquelle il atteignait la rive droite du Préry occidental, à quelque 200 mètres au Sud de la ferme du Fond de Piévache actuelle ? La configuration des lieux semble justifier parfaitement cette hypothèse.

Ou bien, s*agit-il d’un nom famille, qui serait resté au terrain défriché et exploité par celle-ci ?...

Signalons qu’une cense de Godinry existe sur la route de Xhoiris Filot et qu’un hameau de Godru se trouve dans la région de Basse Wavre (Brabant).



FONTAINE au SABLON.

En wallon Fontinne ä sävion

Les eaux provenant de l’excédent de cette fontaine sont devenues  d’un volume tellement insignifiant, qu’il n’est plus guère possible de déceler la cuvette initiale. On suppose qu’elles s’écoulaient le long du sentier n° 17, dit ruelle au Sablon (w. : touwale à sâvion) , pour aboutir rive droite du Préry, en aval du Bassin de natation actuel.

Le 29 octobre 1781, à la suite d’un accord entre le Magistrat et les tenants de l’ Eglise d’Ensival, au sujet de la « réparation » d’une prairie, endommagée par l’eau et qui était propriété de l’Eglise, il fut décidé que le ruisseau, au lieu de passer le long de la susdite prairie, serait détourné de manière à former une ligne plus directe.

En dédommagement du terrain que le Préry occuperait en coulant dans son nouveau lit. La communauté céda aux représentants de l’Eglise tout le terrain situé entre certaine prairie possédée par N. de Fawe, celle dont il vient d’être question, chemin conduisant à la fontaine au Sablon



LEZ-FONTAINES

Traducion wallonne : Lès-Fontinnes.

        Ce vocable, existant aussi à Natoye, lez-Ciney (province de Namur), semble tirer son origine de plusieurs apparitions d'eau, qui ressemblaient à des sources limpides mais qui n'étaient, en réalité, que les résurgences de masses liquides, provenant des ruisseaux des Rouettes et du Préry, engoulées par les pertuis de la zone calcaire rencontrée.

        Le surélèvement du sol, nécessité par la construction de la grande route de Liège à Verviers, d'abord ; l'établissement de la voie ferrée, ensuite ; puis, l'érection des maisons et usines flanquant la rue de Pepinster ; et, enfin, le creusement des égouts dans cette partie de la commune, ont, depuis longtemps, anéanti toute trace des résurgences précitées.

        Déjà, peu en amont de l'étroit viaduc de la gare, on pouvait se rendre compte de la provenance des eaux formatrices de Lez-Fontaines. Il existait là, en effet, entaillant la rive droite du Préry, une sorte d'éboulis naturel, que tous les Ensivalois dénommaient le Trô del Hèye (trou de l’ardoise), à cause d'une mince couche de roches fortement clivées, de laquelle l'eau ruisselait en abondance.

       Cette même pierre fissurée coupait le fond du Préry et se continuait en direction du Trou Brasy (place de la Station actuelle), où un affaissement du sol permettait de voir couler, à près de quatre mètres de profondeur, une fluence d'eau considérable, à en juger par la rapidité de son cours.

     On jetait d'habitude, dans cette excavation appelée Fosse des Chiens (w. Fosse dès Tchins) la plupart des ordures ménagères du voisinage, les bêtes crevées et celles, parfois, dont on voulait se débarrasser. C'est assez tard, dans la première moitié du XIXe siècle, qu'on se résolut à voûter la dite cavité, maintenant oubliée.

         Une partie de ces eaux souterraines se retrouvent encore aujourd'hui en deux endroits de la commune : le premier dans la cour de l'immeuble occupé naguère par Mademoiselle Juliette Toebac n° 45, rue de Pepinster ; le second dans les dépendances de l'ancien hôtel W. del Marmol puis Garage Sf- Christophe), dans la même rue, n° 55,

         Après quoi, ayant atteint leur niveau de base, dans la plaine alluviale traversée, de nos jours, par la partie Sud-Ouest de la dite rue de Pepinster, ces eaux venaient sourdre, en bouillonnant, à de nombreux points dispersés depuis les rues Beau Jardin et Maréchal, jusqu'en aval du Pont du Purgatoire .

        Ce vaste espace, qui devait, au cours du siècle dernier surtout, se peupler d'une manière si dense, est des plus fréquemment cité dans les archives du ban de Theux : territoire dont il dépendait.


Voici une série d'extraits d'actes, qui feront connaître beaucoup d'anciens possesseurs de biens situés dans ce quartier de la commune :


1517, 27 mai. — Johan Henry, d'Annesyvaulx, reporte au profit de Pirot et Fran- cheux, frères, enfants Johan Agnès jadis, une pièce de preit condist les Fontaines. gisant à Einnesyvaulx, jondant d’vng costé à Wérixhas, d'aultre costé à ry, et de tyre costé az boires Paulus d'Annesyvalz (1),
1540, 1er mars. — Johan Maigre, d'Ennesyvaul, reporte à Matthieu le drappier, de Theux, qui agit au nom de Masset, de Vervier, vng preit estant en le Fontaine, au desoz du dit Ennesyvaul, joindant devers le villaige à Henry Jacqueminet, d'aultre cousté à Franceux Pirot Jaspa





fontaine gougie.
en wallon : fontinne Godjèye,


On a depuis longtemps, dans le langage usuel, abandonné le mot déterminé « fontinne », pour ne conserver que le déterminant « Godjèye ». On dit donc couramment : al Godjèye, ce qui, étendu au terrain environnant le point d’eau, ne manque pas d’intriguer l’amateur de toponymie ; d’autant plus que d’aucuns ont dénaturé l’appellation, en disant « fontaine de la Gougie ». Et l’on est ainsi tenté de songer aux mots gouge et gorgée, en s’ingéniant à découvrir quelque rapport entre les vocables. Les expressions « à la Gougie », ou « de la Gougie » sont fautives ; il faut toujours énoncer « fontaine Gougie .En effet, cette source forestière, qui naît à l'altitude de 215 mètres environ, au flanc Ouest d'un ravin, à peu de distance au Sud-est de la métairie de La Raye, était comprise, au XVIe siècle, dans les biens de certain Martin Gougie, dont le nom figure parmi ceux des taillables du ban de Verviers, en 1569.
Signalé comme demeurant « deseur Ensivaulx, il transporta à Wilheame le Bocquet, en 1574, ses maison, courtil et tenure, là qu'il avoit édifié pardevant le bois d'Oetmont decha Ensivaulx, joindant deseur à pazea et chemin qui tend de Juslenville au dit lieu, et d’aval au chemin qui tend à Pepinster, et des autres côtés à Taisemence ». 
On retrouve ce Martin Gougie (Ghogie, Goghie, Gogie, Gogée...) intervenant à maintes reprises dans des actes officiels. En 1593, par exemple, il agit avec Poncelet Noël, meunier de Theux, par-devant la Cour de justice de ce lieu. 
En 1596, le même Martin, ayant reçu de Lambert Collette 12 dallers de 6 1/2 florins liégeois pièce, grève « sa maison où il demeurt, joindant dessoub à passeau de Pepinster, desseur à l'aisemence du Sr [seigneur].  
Enfin, on peut lire, sous la date du 3 mars 1617, que « Jean maître France, résidant près du Bois, sur Ensival », transporte à Franckinet Jean Franckinet (acceptant pour honorable Henry Renier, jadis Bourg­mestre de Malmedy), la maison, jardin, tenure, appendices, aysances et appartennances en laquelle il demeure, proche dudit Ensivaulx, en lieu devant le Bois, joindante vers soleil levant et couchant à Martin Gogie, et vers: midy à l'aisemence). 
Fuyant, avec des grâces d'orvet, dans la direction Nord-Ouest, le liquide débordant atteint, après un trajet de 200 mètres, tout en sauts et en cascatelles, le sentier communal n° 5 ; il traverse un coin du jardin sis au devant de la ferme
FONTAINE de L’ERMITAGE

Les wallons disent : Fonîinne du VErmitèdie et, parfois, de VErmitrèye.

C’est également du trop-plein de cette source que provient le filet d'eau, quasi parallèle à celui de la fontaine Gougie et qui, naissant de divers suintements dans l’ancienne forêt domaniale, vers 260 mètres d'al­titude, se déverse à 350 mètres de là dans la Vesdre, après avoir traversé, en surface, un coude très prononcé du chemin de Pepinster.

      L'appellation de fontaine de l'Ermitage vient de ce que, vers 1605, deux originaux : Jean Lambermont et Bonaventure Dawans, ayant voulu goûter les charmes de la vie cénobitique, s'étaient construit, dans un léger vallonnement du Bois, aux abords du ruisselet, une cabane, qui n’eut qu’une courte durée.

On trouvera des détails sur l’existence de ces ermites dans le chapi­tre relatif à la paroisse d’Ensival.

FONTAINE au CRESSON.

Fort connue à la ronde sous l’appellation locale : fontinne à cres­son, elle se voit à main droite du dit chemin de Pepinster, à un niveau de quatre mètres à peine en contre-bas de celui-ci et presque à la limite occidentale de la commune. 

 Une sorte de piste en déclivité y menait naguère facilement. Glissant sur une étroite corniche schisteuse, l’eau de cette source, jadis réputée pour sa limpidité, choit aussitôt sur la pente du versant broussailleux, et meurt après une minute à peine de trajet à l’air libre.

Toute trace de cresson a ici disparu depuis belle lurette.

Pour gouverne, les cartes de l’Etat-Major belge ne donnent pas le tracé, presque invisible d’ailleurs, suivi par le débit de la fontaine en question ; mais elles inscrivent le nom de Fontne aux Cressons en regard du ruisselet de la fontaine de l’Ermitage !..

FONTAINE aux HETRES.

Wallon : fontinne as Fawes.

C’est à 500 mètres à peu près, à l’opposite de l’extrême point Sud Ouest de la commune, en bordure d’un charmant boqueteau de hêtres centenaires, abattus vers la fin de la deuxième guerre mondiale, que se trouve cette fontaine monumentale, dont l’aspect se justifierait mal, si l’on ne songeait à l’époque romantique au cours de laquelle elle fut construite.

Bien que fort délabrée, elle était pourtant susceptible d'être réparée sans trop de frais. Elle consistait en un grand bassin ovale, en pierre de taille, entouré d'une banquette, du centre de laquelle une tête de lion en fonte crachait l'eau. Ses récents « maîtres » ont préféré la démolir...


Le trop-plein de la vasque s'écoule, d'abord, en ligne droite vers le Nord ; mais au bout de quelques minutes, le filet d'eau s’infléchit vers l'Ouest et gagne le territoire de Pepinster, où il prend le nom de ry de Chinheid ou de Sohan ; puis, par des fonds boisés ravissants, va se déverser dans la Hoëgne.

La dite fontaine aux Hêtres n'avait pu être aménagée, comme ce fut le cas pour la fontaine aux Tilleuls, que par la famille Biolley ; elle clôturait ainsi dignement les nombreuses transformations effectuées, depuis plus d'un siècle, dans le vaste et paisible domaine de Maison-Bois.
Aux ruisseaux et aux sources cités précédemment, il convient d'ajou­ter ceux-ci, dont tout souvenir s'est éteint dans l'esprit des Ensivalois :



MALFONTAINE.
Traduction en wallon : mal fontinne.

Ce nom, inconnu de nos jours, fut donné à certain point d'eau dont il est tout à fait impossible d’établir la situation ; il signifie : fontaine aux eaux mauvaises. C’était sans doute une résurgence, dans la partie basse de la commune.



                      Gouffres

Le lit de la Vesdre présentait jadis, en des endroits devenus peu identifiables, plusieurs gouffres, dont les documents font, d’ailleurs, rarement mention.

Le principal était connu sous le nom de golfe le Begon.

Le 12 no­vembre 1615, les président et conseillers de la Chambre des comptes liégeoise approuvèrent un acte opéré, le 19 octobre précédent, par devant la Cour de justice de Theux : acte en vertu duquel Pirotte Picquereau, en sa qualité de receveur du prince Ferdinand de Bavière, cédait à Bonaventure Renard, d’Ensival : 

un coup d’eawe, à le prendre en la rivière de Vesdre passante à Ensivaulx, en lieu dit pardessoub la goffre le Beghon, pour le conduire et minner sur une usine de follerie az draps, que ledit Bonaventure prétend faire édifier sur vng sien héritaige, estante proche d’illecque, avec ce aussy pouvoir et authorité de, en laditte eawe ou rivière, faire batte et ventillerie en semblables édifices afférants [...]. Parmy par ledit Bonaventure, ses hoirs héritiers et représentants, rendant et payant à Sa dite Altesse et Table épiscopale, à raison dudit coup d’eawe, vng quart de florins d’or de cens ou la valleur, eschéans et à payer, ens mains du recepveur d’icelle, chascun an au jour de la Notre Dame Assumption, en mois d’aoust... .

Il est vraisemblable que, au cours des temps, cette « gofïe » se sera comblée par l’accumulation des graviers venus de l’amont.

Comme l’emplacement de cette foulerie, érigée par B. Renard, correspond à l’endroit où se trouve aujourd’hui le Moulin, il en résulte que l’ancien gouffre le Begon ne peut être recherché qu’à peu de distance au- dessus' de la prise d’eau du bief qui actionne l’établissement.





Marécages 

          Beaucoup de dépressions du plateau, au Sud de la commune, montraient , à la fin du XIX° siècle, de petits marécages, qui se prolongeaient sous un lit de gazons mouvants et de mousses spongieuses. 

       De larges flaques, pour ainsi dire permanentes, se voyaient aussi, mais plus anciennement pourtant  aux abords de la rue de la Foulerie comme sur les terrains vagues où fut bâtie l'usine Snoeck (vers 1860).

     Une tradition subsiste même, d’après laquelle une sorte d'étang aurait existé à l'endroit qu'occupe actuellement la Maison commune, soit devant les habitations des côtés Sud et Ouest de la Place


 Eau potable 


        Les ruisseaux et fontaines précédemment cités fournirent d'eau lus ou moins potable les habitants de leur voisinage. Mais les occupants du bourg même furent toujours moins favorisés.

         En effet, en dehors de la rivière, qui ne cessait de se contaminer, les Ensivalois de la vallée ne disposaient guère que de l'eau provenant des pluies, recueillie dans de grands tonneaux ou dans des citernes à étanchéité suspecte. 

      Plusieurs particuliers possédaient en outre des puits ; mais, malgré leur pureté depuis longtemps déjà mise en doute , les résurgences de Lez-Fontaines continuaient d'être utilisées par beaucoup de ménages pauvre. 

     C'est à ce trop long usage d'eaux insalubres qu'on a attribué le nombre élevé de goitreux, noté jadis dans la commune. Cette pénible situation dura jusqu'assez tard dans le courant du XVIIIe siècle.

      Toutes les recherches entreprises, en vue de découvrir des sources de bonne qualité, avaient été, l'une après l'autre, jugées infructueuses. Faute de mieux, sur une conduite souterraine qui partait du Préry moyen, on fixa quelques tuyaux en terre cuite, en plomb ou en fer, déversant, à jet continu, l’eau dans de longs bacs en pierre, dont un seul subsiste, au début et à droite de la rue de la Montagne, enclavé dans le mur soutenant la terrasse de la Gare.

      Une auge plus ancienne, sise en haut et à gauche de la rue du Canal, près de l'immeuble n° 51, fut détruite vers la fin de 1952.

     Un troisième bac se voyait, naguère, au sortir immédiat et à gauche, du viaduc du chemin de fer, dans un petit retrait du talus ; il rendait peu de services et il était mal respecté ; on profita d'une amélioration de la voirie en cet endroit, vers 1950, pour le supprimer.

     Un quatrième vaisseau, de forme à peu près semblable à celle de l’auge précitée, se trouvait près de l’angle Nord-Ouest de la rue de l’Eglise 

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      il a disparu en même temps que les charmantes vieilles maisons qu’il avait si longuement servies. 

       Enfin, plus monumental que les autres, un cinquième bac marquait le coin Nord-Ouest de la rue Neuve. Il était devenu fort caduc ; mais, datant de 1752, il constituait un souvenir de valeur du Viel-Ensival.

      Sa destruction est regrettable.

   Mais le bac en pierre , le dernier d’une série de vaisseaux semblables posés jadis dans les différents quartiers de la bourgade mérite, lui, d’être soigneusement conservé. 

    Sa face extérieure d’aval porte, en effet, dans un cartouche rectangulaire incurvé à chacun des angles, le millésime respectable déjà de 1752, ciselé en beaux caractères d’Elzévir. 

     Ce serait faire acte de vandalisme, que de laisser détruire ce petit monument prolétaire, qui a rendu tant de services à la population ; qui a entendu les clabauderies de tant de générations de lavandières ; assisté à tant de jeux folâtres d’enfants ; qui a rafraîchi tant de passants, de soldats ; abreuvé chiens, chevaux, moineaux, etc. 

    Jules Peutemans  demande à la Commission royale des Monuments et des Sites d’intervenir auprès de l’édilité locale, en priant celle-ci de faire, d’urgence, mettre à l’abri de toute atteinte brutale le bac de fontaine en question. 

     Deux solutions nous paraissent pouvoir être suggérées en l’occurrence ; l’une et l’autre seraient réalisables à peu de frais : 
1°) faire transporter l’objet, soit dans une cour de la Maison commune (rue Davignon), soit dans un parterre fleuri de l’hospice Sainte-Elisabeth, où, garni de plantes vivaces et entouré de fin gazon, il durerait autant que durera l’Hospice lui-même ! 

   A travers le grillage, tous les passants pourraient le voir encore et évoquer les nombreux événements dont il fut témoin ;

 2°) le déposer au Musée communal de Verviers, ou à celui de la Vie Wallonne, à Liège. Nos préférences, évidemment, sont pour le transfert à l’Hospice .

     En juillet 1780, la commune s'occupa beaucoup détendre sa distribution d'eau et projeta même le placement de deux pompes publiques. Peu de temps après (31 mai 1783), les magistrats locaux décidèrent d’acquérir un jardin, connu sous le nom de Vieux-Cortil, situé en Grand Wérixhas et que son propriétaire, le chanoine de Résimont, menaçait de faire enclore : ce qui risquait de dénaturer l’aspect coutumier de la place.

     L'achat s'effectua. Or, ayant fait creuser ce terrain pour y extraire du sable à paver, comme on avait atteint la profondeur de 10 à 12 pieds, d'aucuns émirent l'avis qu'il fallait foncer plus avant, sous espoir d'y trouver une source.

   Des connaisseurs furent consultés et, sur leur opinion favorable, l'édilité ordonna, par recès du 16 septembre suivant, de faire approfondir l'excavation. Ce travail fut confié à Jean-Joseph Wuidar. de Hodbomont (Theux), « homme au fait et très versé dans la pratique des puits .

     L'opération donna de bons résultats et, sur le puits ainsi ouvert» on établit bientôt une pompe. Celle-ci se trouvait à l'endroit où se dresse aujourd'hui le Monument commémoratif des Victimes de la guerre de 1914-1918.

   En présence des services rendus par cette première pompe, les habitants du quartier de Grand Ville en réclamèrent une, eux aussi, faisant valoir, avec raison, qu'ils manquaient non seulement d'eau potable, mais encore de toute autre eau, et qu'ils ne pouvaient s'en pourvoir « qu'à grand fraix, à raison de la rampe de la rue . 

     Déférant à cette demande, le Magistrat résolut, le 17 juillet 1787, de faire creuser un puits vers le milieu de la Grand Ville, et chargea le même J.-J. Wuidar de l'exécution du travail, « au prix de 6 escalins par pied, outre le fournissement des outils, hernats, à la réserve des bois et ramaille pour soutenir le terrain. Plus d'un Ensivalois chenu se souvient certainement de cette vieille pompe, à haut fût octogonal en fonte et à brimbale (2de moitié du XIXe siècle), remplacée plus tard par la borne cylindrique qui se trouvait encore naguère sur le trottoir Nord de l'artère, proche la ruelle du Patronage.

     D'autres pompes de ce dernier modèle, livrées par la firme J. 0 J. Dewandre, de Liège, vinrent également accroître les commodités de nos ménagères. Il en existait une, notamment, à l'angle Sud-est du carrefour du Ponçay ;  une à l'entrée (côté Sud) du Trou Stenheuse, rue de l'Eglise ; — une vis à vis de l'immeuble n° 9, même rue ; — une enfin sur le trottoir de la défunte Blanche foulerie, rue de Verviers, vis à vis de la fabrique de draps J. Chatin & Cie.

     En octobre 1814, l'Administration municipale avisait, de nouveau, au meilleur moyen d'amener l'eau du Préry sur un secteur élargi de l'agglomération. Plus près de nous, la commune obtint de pouvoir se servir des eaux du Fierain, coulant entièrement sur le territoire de Lambermont. L’emploi de celles-ci donna lieu plusieurs fois à d'âpres conflits entre Ensival et le propriétaire des biens traversés, feu André de Collombs-Gueury.

    Le 17 janvier 1923, par exemple, le Tribunal civil de Verviers prononçait un jugement en vertu duquel la Commune (avocat Albert Bonjean) était condamnée à payer, solidairement avec son entrepreneur de travaux, une amende de 1000 francs au profit du dit A. de Collombs (avocat Me E. Lhoest). Au cours des terrassements nécessités par la canalisation du Fierain, des ouvriers de l’entrepreneur avaient dû, paraît-il, piétiner plus ou moins un terrain du plaignant. 

    S’il marqua un notable progrès sur les eaux employées jusqu’alors, l’usage de celles du Fierain ne fut pas sans provoquer de plaintes ; on leur reprocha, notamment, de fréquents arrêts dans leur débit, et aussi leur « dureté », qui les rendait non savonneuses et tapissait vite l’intérieur des bouilloires, tuyauteries et chaudières d’une épaisse couche de calcaire. La canalisation fut améliorée en 1935. Depuis 1875-1876, enfin, la distribution d’eau de la Gileppe rend aux particuliers et industriels d’Ensival des services que n’eussent pu rêver les générations d’il y a moins d’un siècle seulement. Et tout progrès en amène d’autres... 

Biefs

L’essor que commençait à prendre le travail de la laine dans la vallée de la Vesdre, vers la fin du XVe siècle, amena nos artisans (laveurs, foulions, teinturiers), à recourir à des débits d’eau plus réguliers que celui que leur fournissait la rivière. Ils sollicitèrent donc, du pouvoir souverain, l’autorisation d’établir des biefs ou petits canaux, desquels il sera reparlé dans le chapitre traitant des industries locales.

       Comme les dites dérivations sont subordonnées à la création de barrages, il fallait, avant tout, à cause de la mitoyenneté du cours d’eau, obtenir l’acquiescement à la fois du prince-évêque de Liège et du duc de Brabant-Limbourg.

        Ceux-ci accordaient généralement la permission demandée, à condition que les concessionnaires, leur payassent un cens annuel, fort peu élevé d'ailleurs, et que les droits des habitants ne fussent, d'aucune façon, lésés.

Les biefs ensivalois furent au nombre de trois.
Je les cite dans l’ordre d’ancienneté, c'est à dire d'amont en aval.

Bief des Fouleries ou Canal des Usiniers (w. Bî des Folerèyes).

Le barrage qui permit d'élever la vanne d'entrée de ce canal, a la crête de son déversoir à l'altitude de 150 m. 69, le plafond étant à 150 m. 47 et l'étiage à 150 m. 70 : les hautes eaux peuvent atteindre ici 151 m. 67 ; le fond aval se situe à 149 m. 50.

Partant d'un point gisant à l'angle Nord-Est des usines de la Société anonyme L’ensivaloise, au quartier de l'Abattoir, le bief s'écarte tout de suite de la mère eau, en direction du Nord-Ouest ; mais, au bout de 200 mètres environ de parcours, il vire brusquement à gauche, de façon à rester plus ou moins parallèle à la Vesdre, qu'il va rejoindre au Pont Sauvage, par un déversoir dont la crête est cotée à 146 m. 49 d'altitude, l'étiage étant là fixé à 144 m. 46 et le fond à 143 m. 20.

Depuis le temps lointain où il fut creusé, ce bief n'a cessé d'être l’objet de modifications d'aspect apportées par chacun de ses concessionnaires. C'est ainsi que, coulant d'abord à ciel ouvert, il est actuellement voûté sur la plus grande partie de son cours. Il possède plusieurs embranchements ou conduits de décharge dans la Vesdre. Il a grandement contribué à la vie économique locale ; mais c'est à peine si l'on y pense encore maintenant, sinon pour en maudire ses inconvénients de servitude.

Bief du Moulin (w. Bî de Molin).


Les avantages dont jouissaient les usagers du canal des Fouleries ne tardèrent pas à inciter d'autres petits industriels à revendiquer un bénéfice semblable. Ce fut, comme on l'a vu plus haut, au début du XVIIe siècle que ce nouveau coup d'eau fut accordé au profit de Bonaventure Renard, désireux d'exploiter, lui aussi, une foulerie. Celle-ci était dite d’Ensival, parce qu'étant la plus, rapprochée du cœur de l'agglomération.

Le barrage qui livre l'eau à la vanne d'entrée de ce bief est établi à 180 mètres environ en aval du Pont Sauvage, sur un plafond dont l'altitude est de 143 m. 60, avec crête à la cote de 144 m.l'étiage en est fixé à 144 m. 07, tandis que le fond aval est à 143 mètres et que les hautes eaux peuvent ici mouiller la graduation de 145 m. 70.

Par une écluse ouverte à la rive droite, il envoyait les ondes motrices à un moulin, longtemps appelé le Moulin Fraiteur.

À la rive gauche, peu au-dessous de l'ancien gouffre le Begon, il alimentait le canal de la dite foulerie B. Renard, laquelle se mua plus tard en moulin à farine. Long d'une centaine de mètres, ce canal vient rejoindre la rivière à l'amont du Pont d'Ensival.


Bief de la Raye (w. Bî d’èl Rèye).


Celui-ci, construit seulement vers 1830, sur la dernière languette de terrain disponible à l'entrée du hameau de La Raye, n'eut qu'une utilité relativement brève ; son unique raison d'être fut d'actionner un petit établissement textile dont l'exploitation finit par s'avérer déficitaire. La concession du coup d'eau avait été demandée au Gouvernement hollandais, par Aubin-Joseph Sauvage, de Francomont, et Henri Lejeune-Vincent, de Dison.

On voit encore actuellement, proche l'amont de la culée Sud du pont particulier de La Raye, l'entrée en pierres de taille de cette dernière dérivation ensivaloise de la Vesdre, qui était longue de 230 mètres environ et qui est aujourd'hui presque entièrement comblée.

Il importe de faire observer que, à partir de la seconde moitié du XVIIe siècle, on désigna sous le nom de Canal toute la partie basse du Préry, c'est à dire depuis l'angle Sud-ouest de Donheid jusqu'à l'embouchure du ruisseau.

L'hygiène du bourg gagna beaucoup à l' en-muraillèrent des rives du dit ruisseau : travail qui n'avait pu s’effectuer que par étapes fort espacées.

     Il faut noter également que, peu avant de finir son cours, et principalement dans sa traversée du Wérixhas, le Préry envoyait une certaine quantité de ses eaux, claires ou non, dans plusieurs fossés venant s’amorcer à sa rive gauche et servant à l’irrigation des prés voisins', en direction de Lez-Fontaines. On désignait ces sortes de tranchées et de sillons sous les noms de xhorés, de bîs ou de soxhes.







ENSIVAL. Le bief des Fouleries, vu du côté
Nord-Est de la rue du Tissage.
Photo Arsène FlNCK (1943).
La longueur totale de ce canal est de 795 mètres ; sa largeur est de 4 m. 25. Le seuil de la vanne de prise d'eau est établi à l'altitude de 149 m, 84 (l'étiage, on Ta dit, étant à 150 m. 70) ; le courant, aux hautes eaux, y atteint la cote de 152 m. 48.









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La voirie d’Ancien Régime 

   Un état de la population, dressé à la demande du sous-préfet le 14 thermidor an VIII (2.8.1800), donne une idée de ce que pouvait être, à la fin de l’Ancien Régime, la physionomie du territoire ensivalois: un noyau central auquel se reliaient quelques écarts, situés à proximité de l’un ou l’autre des grands chemins qui menaient aux localités voisines.




Nombre de feux
Habitants
Défenseurs de la patrie
Ensival
300
1,34
30
La Houckaye
3
10
-
La haute folie
1
5
-
Donnheid
1
3
-
Pied-Vache
1
9
1
Au Bois
5
21
1
Ferme Biolley
1
-
-
Raye
2
7
1
la Foulerie
3
15
-


319
1,41
33


         En dépit de ses imperfections, la Carte de Cabinet des Pays-Bas autrichiens, levée de 1771 à 1778 a l'initiative du comte de Ferraris, relate bien la situation exposée en cette fin du XVIII siécle .

       Le centre d'Ensival comprenait le Wérixhas, ses abords immédiats et son prolongement, la rue des Weines. Sur l’autre rive de la Vesdre, aux confins du duché de Limbourg, s’étalaient les manufactures et les demeures patriciennes de Francomont ainsi que les quelques habitations de Francval et du Cherreau (Tchèrâ), ensemble bâti dans le courant du XVIIIe siècle. 

      El Mi-Ville les anciennes rues (Maison Commune et de l’Eglise) débouchaient sur le Wérixhas; a son extrémité opposée une groupe de maisons occupaient le Préay, sur le site de la place de la Brassine et de la ruelle des Prés. 

     La rue de Pepinster ne figurait pas sur la carte de Ferraris. On distinguait également, en bordure de la voie qui se dirigeait vers le Bois, les habitations qio s’alignaient du Ponçay à la rue de la Montagne (actuelle rue du Trou Brasy), jusqu’un peu plus haut que le point de départ du chemin de Gérardheid.



                                    Ferrari (1771-1778
a remarquer l'importance de Francomont et Francval par rapport à Lambermont; de même l'espace vide déparant Ensival de Verviers et Hodimont. La cartographie mentionne le lieu-dit Maison-Bois inexistant à cette époque, au lieu de Hameau du bois (au bois).


escalier tour rue Maison Commune (mi-ville) démoli en 1960

        La Grand Ville allait jusqu’à la Heid des Fawes; elle était loin d’être entièrement bâtie. 

   
     A sa droite, après la montée, prenait naissance la Voie des Morts (Voye des Mwèrts) qui permettait de gagner Verviers. Quelques maisons se situaient au bas de ce raidillon. 

         Un quart de siècle plus tard, les données n’avaient pas évolué. La Commune comptait 316 maisons, dont 8 inoccupées. La plupart des 632 ménages s’y encaquaient dans des conditions miséreuses. 

         120 de ces habitations ne permettaient d’accueillir qu’une seule famille; les 188 autres abritaient les 512 ménages restants. Le rapport de la Commune ne dit mot des demeures des notables du bourg; on peut présumer qu’elles étaient comprises dans la première catégorie, de même que les bâtiments agricoles disséminés dans la campagne.

      A propos du nombre des maisons au XVIIIe siècle, on se contentera de sourire aux affirmations -reprises dans le Mémoire détaillé du païs de Limbourg, remis au comte d’Argenton - par le chevalier de Soupire, brigadier des armées du roi, maréchal général des logis de l'armée. Son auteur relate qu ’en 1748, les 2.500 maisons de Verviers, les 200 de Hodimont et les 160 d'Ensival ont permis de loger ( très à l’aise ) respectivement quatorze, deux et huit bataillons. 

          Il s’en fallait de beaucoup que cette voirie locale fût entièrement pavée ou même simplement empierrée. En 1717, la communauté d’Ensival avait obtenu du prince la permission de percevoir un droit de passage à condition de faire paver le bourg, ou tout au moins le tronçon visé par ce droit: la voie d’accès au pont pour le charroi venant de Verviers. Furent pavées la Grand Ville, les rues de l’Eglise, Maison Commune et l’accès au pont par le Wérixhas. La taxe de transit épargnait les piétons, à la différence des charrettes et des chevaux étrangers au bourg, pour lesquels devait être respectivement acquitté un droit d’un sou (quatre liards) et d’un liard.

          Cette taxe, supprimée lors de la Révolution, était nécessaire à l’entretien de cette voirie qu’empruntait principalement le charroi verviétois. Les droits d’entrée et de sortie perçus au passage du pont par les Etats riverains avaient évidemment disparu depuis la même époque. Des essais furent tentés pour rétablir la taxe de transit, acquittée aux « “barrières communale » selon les termes employés par la Commune le 3 décembre 1815 dans sa requête adressé aux nouvelles autorités mises en place après le départ des Français. Jusqu’alors, une fin de recevoir avait été réservée à semblables demandes.

       Ce droit de passage était gênant pour les communautés voisines, très proches d’Ensival ainsi Francomont et Francval dans la juridiction de Grand-Rechain, seulement séparée d’Ensival par la Vesdre. Une discussion s’engagea à ce propos en 1791 entre Grand-Rechain et Ensival. Elle se termina par l’accord du Magistrat d’Ensival d’exempter de ce péage les manants de Grand-Rechain.

      On note cependant, sous l’occupation française, quelques mois avant l’annexion République, une décision prise par la municipalité, qui rétablissait le droit de barrière. Le 28 prairial an III (16 juin 1795) avaient été désignés par adjudication publique, trois percepteurs des taxes, aux conditions suivantes: les droits de barrière seraient exactement les mêmes que sous l’ancien Régime; n’en seraient exemptés que les Ensivalois; les “repreneurs” solvables, munis d’un “bon cautionnaire”, devraient verser le montant de leur “reprise’ municipalité en quatre termes trimestriels allant du 20 juin 1795 au 29 juin 1796. 

      Les trois barrières furent adjugées aux citoyens Lambert Deschamps, Joseph Boverie, Jean-Joseph Scuvée aux montants respectifs de 42, 106 et 41 francs. La première barrière interceptait ceux qui pénétraient par le pont ou par la “voie du duc du côté de les Weine, la deuxième par la Grand Ville, la troisième par le Couquemont, le Préry et la ruelle Donheid soit au bas de la rue de la Montagne. 

     Cette décision municipale n’a-t-elle produit que des effets limités? Les autorités de tutelle l’ont-elles annulée? On pourrait le croire puisque, le 22 avril 1816, le bourgmestre affirmera qu’Ensival a été privé du droit de barrière en 1793 et ne mentionnera pas une reprise depuis cette époque.

       Ajoutons cependant qu’il n’y a pas lieu de s’étonner de constater qu’une barrière ait pu subsister rue Grand Ville jusqu’en 1874 et au delà. Le droit de barrière était alors à son déclin, quant à l’octroi, il avait été supprimé en 1860. En 1886, la Province de Liège cessait mentionner dans son budget les recettes des barrières, cette taxe ne rapportant plus



 La poste, le télégraphe et le téléphone





  Ce n’est qu’au XIXe siècle que l’on vit se développer le service postal à Ensival.

     Auparavant, celui qui aurait voulu recourir aux services de la poste locale aurait dû se rendre à Verviers pour confier sa correspondance au messager municipal, qui, à pied ou à cheval, gagnait Liège. La correspondance était déposée au bureau d’arrivée, où le destinataire pouvait en prendre livraison. 

    On relève toutefois, le 17 février 1737, une amélioration au système. Le bourgmestre d’Ensival avait fait placer à la porte de Despa, capitaine de la compagnie du bourg, un bloc pour y déposer les lettres à destination de Liège.

    Le messager de Verviers venait en prendre livraison en passant par Ensival. Passés les soubresauts de la période révolutionnaire, l’Etat réorganisa le service postal.


 Les malles-poste, déjà présentes à la fin de l’Ancien Régime grâce à l’amélioration de la voirie, reprirent la route. Dès 1797, chaque jour, une malle-poste quittait Verviers à 8 h 30; une autre y arrivait à 13 h, mettant la ville en contact avec Paris, l’intérieur de la République, la Hollande et l’Allemagne. Pratiquement, la malle-poste gagnait Herve, relais sur la grand route Liège-Aix.



       Les messagers n’avaient pas perdu leur raison d’être; ils assumaient le service entre Verviers et les localités voisines, ainsi Spa et Limbourg. 

        Un avis, passé dans Le Journal de Verviers des 1er et 2 février 1836 à l’initiative du directeur des postes de Verviers, confirme la continuité de ces services. Dorénavant, communiquait-il, la malle-poste quittera Herve pour Verviers vers 9 h. Elle retournera à Herve à 20 h. 

     
Sur le même itinéraire, un piéton partira de Verviers à 14 h; il quittera Herve à 19 h 30 pour revenir à Verviers à 21 h 30. Le messager de Spa, remplacé par un cavalier, quittera Verviers vers 10 h, après l’arrivée de la malle de Herve. Il regagnera Verviers à 20 h, ayant quitté Spa à 18 h. Par la même occasion, nous apprenons que le bureau de poste de Verviers était ouvert au public de 7 à 12 h et de 16 à 18 h. La levée de la boîte aux lettres était prévue de façon à ce que le courrier puisse être acheminé immédiatement vers Herve. A l’époque, le bureau de distribution de Verviers était devenu en 1834 un bureau de perception.


   Un seul facteur assurait la distribution, mais, dans ce domaine, il faut tenir compte du volume relatif du courrier et de l’étendue de la ville.

     

      Liège n’était pas mieux lotie qui, sous le régime hollandais, ne disposait que deux boîtes postales et n’était desservie que par trois facteurs. Une sérieuse amélioration sera apportée au service postal en 1843, lors de la création de la ligne de chemin de fer, ce qui ne fera pas disparaître ipso facto malles-poste et diligences.

     
En principe, le port d’une lettre était payé par le destinataire; la situation changera quand, le 1er juillet 1849, seront mis en circulation les deux premiers timbres-poste.

   Le Royaume Uni avait montré la voie dès le 6 mai 1840. En cette année 1849, le bureau de perception de Verviers était le seul dans sa zone postale. Peu de temps après son accession au rang de perception, on relève toutefois à Ensival, en 1836 avec certitude, la trace d’un service postal placé sous l’autorité de ce bureau de Verviers. 


        Une première mention apparaît le 27 décembre 1836 par le biais de la transmission par la Commune au percepteur des postes de Verviers d’un état de frais “occasionnés par la poste aux lettres”. 

         Des rapports adressés par la suite au commissaire d’arrondissement, à la direction des postes de la province et au percepteur des postes de Verviers, on sait que le service des postes rurales s’effectuait avec régularité; que les facteurs Rensonnet (1837) et Balhan (1845) s’acquittaient scrupuleusement de leur tâche; qu’en 1837, la seule plainte des habitants concernait le port des lettres (10 centimes) pour le peu de distance qui séparait Ensival de Verviers. 

       A partir de 1845, la boîte aux lettres était levée deux fois par jour et les facteurs desservaient également deux fois par jour la commune. Cette boîte aux lettres était située au centre du village, au domicile du garde champêtre; elle était toutefois accessible au public par l’extérieur.
     
      Nous avons vu, à propos de la nomination en 1851 du premier chef de gare, que celui-ci était également percepteur des postes et que cette situation se prolongea très longtemps. Il y a cependant tout lieu de croire que cette dualité de fonctions ne débuta qu’en 1852, date de la création du bureau de perception d’Ensival, la prestation de serment de E. Amiable en tant que percepteur des postes ayant eu lieu le 10 juin 1852, devant le bourgmestre d’ Ensival.

      A Ensival, le bureau de perception n’a donc pas été précédé par un bureau de distribution. Quelques renseignements fragmentaires nous apprennent qu’en 1874, le chef de station et percepteur des postes M. Crochet avait sous ses ordres trois facteurs des postes qui desservaient un canton postal s’étendant sur Ensival, Heusy, Lambermont et Wegnez.

 
  Un facteur de station et quatre commis complétaient l’effectif commun à la poste et aux chemins de fer. Le courrier était expédié dans trois directions: Liège, Pepinster et Verviers, respectivement trois, une et trois fois par jour entre 11 h 56 et 22 h. La levée des boîtes aux lettres s’effectuait six fois par jour, de 8 à 21 h. Lambermont et Wegnez étaient desservis une fois par jour; Heusy l’était deux fois; quant à Ensival, deux tournées avaient lieu à 7 h 15 et 15 h 30, une troisième à 18 h 30, limitée au centre de la commune.


    

       Une statistique réalisée pour les années 1871 et 1872, ne concernant que les expéditions, fournit les chiffres suivants, qui témoignent de l’ampleur prise par le service postal à Ensival, une vingtaine d’années seulement après son installation; l’activité industrielle ne fut pas étrangère à cette extension: lettres: 102.648; 80.470 - journaux : 2.691; 3.675 - imprimés: 36.036; 22.496 - échantillons: 11.661; 15.392178. 

     Pour n’être desservi que par trois facteurs, le canton postal ne couvrait pas moins un territoire assez étendu, où les écarts nécessitaient de parcourir de longues distances. L’habitat, qui à cette époque se focalisait au centre des localités, allait connaître par la suite des développements qui, par voie de conséquence, amenèrent des modifications dans les effectifs.

     
La poste quitta les locaux qu’elle occupait à la gare pour s’installer dans le bâtiment construit en 1898 rue Jean Martin Maréchal. Un détail architectural, la façade en escaliers, rappelle le premier bâtiment de la gare, édifié le long du quai d’embarquement pour Liège.



    L’année qui précéda le transfert de la poste dans ses nouveaux locaux, on enregistra, suivant un rapport de la Chambre de Commerce, un total assez impressionnant de correspondances expédiées d’Ensival: 83.156 lettres, 40.976 cartes postales, 7.904 journaux, 143.000 imprimés, 5.720 échantillons et 364 papiers d’affaires. 

    La carte postale, qui fit son apparition en 1871, affirmait déjà une progression importante par rapport à la lettre. Heusy devint un dépôt-relais le 28 novembre 1881180 et fut desservi par Verviers. Le canton postal d’Ensival comprit dès lors Ensival, Wegnez et Lambermont. 

     Une partie de Wegnez sera cependant desservie par Pepinster; quant à Lambermont, certains endroits relevaient des bureaux de Verviers et de Dison. Le nombre des tournées de distribution passa à huit. 

   Le dépôt des télégrammes installé à la gare ne suivit pas la poste lors de son transfert rue Jean Martin Maréchal.

   On avait pu relever, pour les années 1869 à 1872, un nombre de télé-grammes transmis d’Ensival allant de 1.300 à 1876, pour une moyenne de 1.654181. En 1897, leur nombre atteignait 3.991182. Le télégraphe s’était installé dès 1866. 

  L’année précédente, poste et chemin de fer, bien que dépendant du même ministère, étaient devenues deux administrations distinctes, situation qui ne changea en rien la dualité des fonctions de chef de station et de percepteur de postes d’Ensival.

 
Une photographie réalisée vers 1910 montre le personnel de la poste: neuf facteurs groupés autour du percepteur. Cet effectif était pratiquement le même dans les années qui suivirent la fin de la seconde guerre mondiale, si l’on tient compte de deux employés, absents sur la photo.





     
 Le téléphone public donna lieu, en 1891, à l’émission de timbres accompagnés d’une souche servant de reçu.

      A ce moment, la poste était encore hébergée dans les locaux de la gare. La région verviétoise connut d’autres manifestations plus remarquables de l’extension du réseau téléphonique; le faîte de la maison communale d’Ensival fut ainsi coiffé d’un support d’aspect assez disgracieux. 





       
La maison communale au début du XXe siècle, le toit sommé d’un support d’installation téléphonique


























La maison communale et la Grand Place, peu après 1921. L ’installation téléphonique a disparu, remplacée par deux pylônes


        Deux cartes postales datant du début du XXe siècle ont immortalisé cette installation, que l’on retrouvait également sur le toit de la gendarmerie, chaussée de Heusy, et, plus imposante, sur celui d’un immeuble du Pont Saint-Laurent. 




      Depuis 1903, la centrale téléphonique, surmontée elle aussi d’un dispositif impressionnant, avait été édifiée rue du Collège, à Verviers. Quelques années plus tard, elle fut transférée dans le nouvel hôtel des postes, Un pylône, situé à proximité de la maison communale, succéda à cette installation. Il se trouvait toujours en place pendant la seconde guerre mondiale. Enfin, en un temps où les cabines téléphoniques étaient encore à venir, la poste assurait ce service, Verviers étant le centre dirigeant du réseau.










1 commentaire:

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